Une société de gestion de portefeuille doit gérer dans le seul intérêt des investisseurs (CE, 27 juillet 2015)



Une société de gestion de portefeuille (SGP) doit déployer une gestion dans le seul intérêt des investisseurs. Beauté de la régulation, et de ses ciselages complexes, c’est le Conseil d’Etat qui le rappelle en le jugeant (CE, 6e SSJS, 27 juillet 2015, n ° 382550, Soc. Turgot Asset / AMF). Il rejette ainsi le recours contre la décision de la Commission des sanctions de l'AMF (du 12 mai 2014) qui avait réprimé cette société de gestion, et ce n'était pas du reste le seul grief formulé à son encontre (la décision purge aussi un délicate question sur la surveillance du risque de liquidité).

Après une opération considérable sur un OPC (organisme de placement collectif), qui le mettait à un montant d'actif net qui valait cause de dissolution, des souscriptions de 3 fonds (gérés par Turgot) avaient eu lieu qui ne semblait pas correspondre à cette préoccupation mais à la volonté de sauver le premier fonds de la liquidation. Une gestion fondée par d’autres motifs, révélés par le contrôle de l’AMF (Autorité qui donne l’agrément auxdites SGP), justifie une procédure de sanction et une sanction. Le principe est en effet que la SGP (et aussi l'établissement dépositaire) agissent dans le seul intérêt des souscripteurs et en toute indépendance (art. L. 214-9, CMF).

Assez directement, le juge administratif juge ainsi ce que doivent être ou non les rapports entre un OPC (organisme de droit privé) et les investisseurs (privés eux aussi), et les actes de l'OPC. L’obligation de gestion, obligation d’ordre éminemment privée, quoique la loi impose ce mandat de gestion (un mandat légal), échappe au juge judiciaire lequel a, de siècles en siècles, eu à juger du droit des affaires (le fameux droit commercial ; sur une vision pessimiste du droit commercial : M. Cabrillac, in Mélanges Jean Foyer).

Dans cette affaire, le contrôle aura également révélé le défaut d’une procédure interne prévenant le risque de liquidité ; malgré un grief que la SGP se devait d'invoquer, le juge administratif, jouant sur l’esprit des larges pouvoirs dévolus à l’AMF, et la largesse des obligations prudentielles, considère que cette obligation existait bel et bien avant que ne soit adopté un texte "plus" explicite.

De quoi combler l’AMF et, encore, alimenter le « pouvoir de régulation »…

Tout le monde y apporte sa pierre.

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