Les avocats pourront bientôt démarcher des prospects : une véritable révolution publicitaire



Les avocats pourront bientôt démarcher des prospects : une véritable révolution publicitaire
La fin de l'interdiction faite aux avocats de démarcher de futurs clients a été adoptée par le Sénat, ce mois de septembre, au cours du débat et vote du projet de la loi sur la consommation (projet Hamon). L'article 5 du projet, en l'état, ajoute à la loi de 1971 sur les professions juridiques un dispositif révolutionnaire :
« Dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, l’avocat est autorisé à recourir à la publicité ainsi qu’à la sollicitation personnalisée.
Toute prestation réalisée à la suite d’une sollicitation personnalisée fait l’objet d’une convention d’honoraires.
»

Le décret d’application semble déterminant, sauf qu'il ne pourra pas inverser le sens général du texte qui est à une autorisation de principe (osons-nous dire) de la publicité et du démarchage ("la sollicitation personnalisée). En effet, on voit mal les conditions réglementaires interdire en pratique la publicité : le texte serait attaqué et annulé.

Cette nouvelle disposition légale est commandée par l’Union européenne. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a jugé que « l'article 24, paragraphe 1, de la directive 2006/123/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, relative aux services dans le marché intérieur, doit être interprété en ce sens qu'il s'oppose à une réglementation nationale qui interdit totalement aux membres d'une profession réglementée, telle que la profession d'expert-comptable, d'effectuer des actes de démarchage » (CJUE, 5 avril 2011, Société fiduciaire nationale d’expertise comptable).

Le législateur doit estimer que, s'agissant d'une profession réglementée, il n'y a pas lieu de réglementer le démarchage d'espèce. Cela se discute. En tout cas, la seule obligation prévue est d'établir une convention d'honoraires dont on peut penser qu'il aurait fallu mentionner qu'elle sera "écrite", ce que le sénat a oublié - à moins que les sénateurs ignorent qu'une convention peut-être orale. Voilà en tout cas une curieuse protection car les honoraires ne seront alors plus guère discutables...

Les avocats ont toujours été réticents à cette voie qui, cependant, couplée à la publicité, a fait son chemin. L'interdiction a principalement pour handicap de laisser à ceux qui osent prendre le risque d'une sanction le bénéfice de démarchages, aussi discrets que manifestes oserons-nous penser.

La profession d'avocat est en effet fragilisée, car les écoles d'avocats ont produit un nombre parfois très élevé d'avocats, du reste et souvent sans spécialité. On connaît le résultat de cette mauvaise gestion de la profession : de nombreux jeunes avocats sortent du métier après quelques années pour ne pas trouver de collaboration ou de clientèle ; la surpopulation au barreau a déjà été soulignée ici :

Lisez ce billet sur les avocats après une enquête du Figaro, cliquez ici

Le projet de loi actuel aura des effets. Ainsi et notamment, les grands cabinets pourront recourir à des publicités dans des grands médias, ce qui pourrait changer la donne en leur permettant notamment de s'installer en province en imposant une image nationale et internationale séduisante. De façon générale, les cabinets petits et moyens pourraient souffrir.

Inutile de dire que ce blog suivra cette évolution à tous égards intéressante pour Direct Droit !


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