Une lettre du Conseil national du Barreau, sous la signature de son président, a fait grand cas de la création de la "HEAD". Il a publié la même opinion dans Droit et patrimoine. Il s'agit d'une école pratique du droit visant le droit des affaires et appuyée par divers cabinets d'avocats. Cette école inquiéterait certains, au Barreau ou à l'Université, je ne sais... Elle est peut-être la conséquence d'un certain relâchement de l'intérêt pour le "vrai droit des affaires" (formule facile, j'en conviens), et la faiblesse des moyens de l'Université, le tout parfois conforté par un manque de volonté des Universités de promouvoir ou même maintenir le droit des affaires - ou sa variante du "droit de l'entreprise". L'école en question est-elle le fruit de cette attitude :
Le site internet de l'école, cliquez ici
A plusieurs reprises je me suis ici étonné de voir l'une des premières spécialités (que le Code de commerce, rien que cela, porte depuis plus de deux siècles...) manquer d'être soutenue dans les Universités. Il y a, il est vrai, une difficulté : la spécialité forme en réalité en trompe-l'oeil tant elle elle est devenue large, les commercialistes se sont divisés en plusieurs spécialités et d'autres ont capté la matière (droit civil des affaires, droit public des affaires, droit international des affaires...). C'est peut-être donc moins de la concurrence d'une école privée dont il faut avoir peur que de l'affaiblissement des formations du droit des affaires dans diverses universités ; la matière y est parfois parfois ramenée au rang de spécialités très étroites. Il n'a échappé à personne qu'il n'y a aucune flexibilité sur les masters - aucune réforme n'est intervenue - et les petites spécialités sont traitées comme les grandes (...). Il est en outre peu rappelé que le droit des affaires constitue une "grande matière" alors que, dans le même temps, on loue la "business law" et les modèles étrangers...
Il y a un certain affaiblissement du droit des affaires, et les meilleurs étudiants s'en détournent parfois alors que la filière leur assurerait un bel avenir. Or la matière suppose de "bons étudiants" ayant assimilé l'essentiel du droit civil et du droit pénal, en quelque sorte pour aller plus loin. La situation s'observe mieux encore avec l'internationalisation des affaires. En effet, comment enseigner le droit des affaires globalisé si les étudiants ne sont pas déjà excellents en droit des affaires à la fin du M1 ?! L'école qui s'ouvre, comme d'autres cursus publics, en général sur Paris, vise donc à sélectionner les meilleurs étudiants issu des filières de droit des affaires. A prendre les meilleurs, on s'assure de ne pas avoir in fine les plus mauvais... L'objectif est d'offrir à ces étudiants les "recettes" de certains cabinets qui préfèrent donc créer "leur école" que de collaborer avec l'université..., parfois parce qu'un concurrent en est déjà "partenaire" (le mot magique).
Sans doute les étudiants (leurs parents ?) de cette école devront payer des droits d'inscription élevés ce qui peut étonner ou faire tiquer au vu de la tradition des formations juridiques. Mais tel est déjà le cas avec diverses "prépas" et au sein même du système supérieur public : la politique universitaire de ces dernières années n'a pas atténue les inégalités avec diverses "grandes écoles" malgré le chambardement de la LRU. Face à ce contexte, il n'est pas évident que l'indignation face à la création de l'école HEAD trouve des fondements solides quand, sur le principe, il est bien difficile de critiquer une initiative privée.
Finalement, ce n'est sans doute pas en cédant en tous points aux sirènes de la professionnalisation, sauf pour les "très grandes", que l'université pourra garder son utilité si, un peu partout, éclosent des écoles pratiques de haut niveau. A l'inverse, l'université conservera toute son utilité en maintenant des savoirs théoriques que les professionnels côtoient quotidiennement tout en travaillant . C'est peut-être pour cela que divers professeurs de droit civil de l'université Paris 1 sont annoncés comme des enseignants de la HEAD ! Finalement, l'espoir est au coeur du désespoir...
Le site internet de l'école, cliquez ici
A plusieurs reprises je me suis ici étonné de voir l'une des premières spécialités (que le Code de commerce, rien que cela, porte depuis plus de deux siècles...) manquer d'être soutenue dans les Universités. Il y a, il est vrai, une difficulté : la spécialité forme en réalité en trompe-l'oeil tant elle elle est devenue large, les commercialistes se sont divisés en plusieurs spécialités et d'autres ont capté la matière (droit civil des affaires, droit public des affaires, droit international des affaires...). C'est peut-être donc moins de la concurrence d'une école privée dont il faut avoir peur que de l'affaiblissement des formations du droit des affaires dans diverses universités ; la matière y est parfois parfois ramenée au rang de spécialités très étroites. Il n'a échappé à personne qu'il n'y a aucune flexibilité sur les masters - aucune réforme n'est intervenue - et les petites spécialités sont traitées comme les grandes (...). Il est en outre peu rappelé que le droit des affaires constitue une "grande matière" alors que, dans le même temps, on loue la "business law" et les modèles étrangers...
Il y a un certain affaiblissement du droit des affaires, et les meilleurs étudiants s'en détournent parfois alors que la filière leur assurerait un bel avenir. Or la matière suppose de "bons étudiants" ayant assimilé l'essentiel du droit civil et du droit pénal, en quelque sorte pour aller plus loin. La situation s'observe mieux encore avec l'internationalisation des affaires. En effet, comment enseigner le droit des affaires globalisé si les étudiants ne sont pas déjà excellents en droit des affaires à la fin du M1 ?! L'école qui s'ouvre, comme d'autres cursus publics, en général sur Paris, vise donc à sélectionner les meilleurs étudiants issu des filières de droit des affaires. A prendre les meilleurs, on s'assure de ne pas avoir in fine les plus mauvais... L'objectif est d'offrir à ces étudiants les "recettes" de certains cabinets qui préfèrent donc créer "leur école" que de collaborer avec l'université..., parfois parce qu'un concurrent en est déjà "partenaire" (le mot magique).
Sans doute les étudiants (leurs parents ?) de cette école devront payer des droits d'inscription élevés ce qui peut étonner ou faire tiquer au vu de la tradition des formations juridiques. Mais tel est déjà le cas avec diverses "prépas" et au sein même du système supérieur public : la politique universitaire de ces dernières années n'a pas atténue les inégalités avec diverses "grandes écoles" malgré le chambardement de la LRU. Face à ce contexte, il n'est pas évident que l'indignation face à la création de l'école HEAD trouve des fondements solides quand, sur le principe, il est bien difficile de critiquer une initiative privée.
Finalement, ce n'est sans doute pas en cédant en tous points aux sirènes de la professionnalisation, sauf pour les "très grandes", que l'université pourra garder son utilité si, un peu partout, éclosent des écoles pratiques de haut niveau. A l'inverse, l'université conservera toute son utilité en maintenant des savoirs théoriques que les professionnels côtoient quotidiennement tout en travaillant . C'est peut-être pour cela que divers professeurs de droit civil de l'université Paris 1 sont annoncés comme des enseignants de la HEAD ! Finalement, l'espoir est au coeur du désespoir...