Troisième cassation dans cette "petite" affaire où les juges du fond voient leur décision cassée. Une véritable catastrophe juridique. A la lecture de l'arrêt nous avions anticipé cette cassation ici même, cliquez ci-dessous, et elle avait été publiée dans la Chronique de droit bancaire du JCP Entreprise publiée dans la même période.
Bref propos sur l'institutrice de Moulins et mention de la Chronique de droit bancaire
Nous avions alors dit que le calvaire de l'institutrice de Moulins méritait de remplacer l'image d'Epinal que s'était faite la Veuve de Carpentras", rien que cela pour signaler les difficultés des juges à trancher ces litiges.
On avoue avoir un peu de retard sur cet arrêt, manifestement la Cour de cassation a voulu rapidement effacer l'arrêt de la Cour d'appel de Limoges rendu en formation solennelle sous la présidence du Premier président... Tout un symbole !
Extrait de LEGIFRANCE
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 12 juin 2012
N° de pourvoi: 11-21661
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que le prestataire de services d'investissement est tenu, dès l'origine des relations contractuelles et quelle que soit la nature de celles-ci, de mettre en garde son client contre les risques encourus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme, hors le cas où ce dernier en a connaissance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 13 juillet 2010, pourvoi n° 09-69. 638), que Mme X..., titulaire de divers comptes ouverts auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin (la Caisse), laquelle lui avait consenti un prêt immobilier, a ouvert auprès de celle-ci un compte-titres et a réalisé, via le service internet mis à sa disposition, des opérations d'achat et de vente de titres avec service de règlement différé ; que la Caisse ayant fait assigner sa cliente en paiement de certaines sommes au titre du solde débiteur de son compte courant et du solde du prêt immobilier, Mme X...a soutenu que la Caisse avait engagé sa responsabilité à son égard ;
Attendu que pour écarter la faute tirée de l'absence d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte, l'arrêt retient que la " convention de conservation de compte d'instruments financiers " mentionne en caractères gras, figurant en préambule des conditions générales, que " l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés " et qu'il s'en déduit nécessairement le risque de perte de l'investissement réalisé ; que l'arrêt ajoute que l'avenant à la convention des forfaits de service de la Caisse mentionne que " le client s'engage expressément, avant de passer ses ordres par internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer, quelles que soient sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissement financier et il accepte le niveau de risque propre à ce type d'opérations " ; qu'il en déduit qu'avant chaque opération en bourse, Mme X...pouvait accéder à des informations propres à l'éclairer sur les caractéristiques des titres sur lesquels elle envisageait d'investir et sur le niveau de risque de son opération ; que l'arrêt relève encore que le responsable clientèle de la Caisse atteste qu'informé du projet de Mme X...de solder son plan d'épargne logement pour effectuer un placement boursier, il a fait part de ses réserves en appelant l'attention de sa cliente sur le caractère aléatoire de ce placement ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la Caisse avait, lors de l'ouverture du compte-titres, mis en garde Mme X...contre les risques encourus dans les opérations spéculatives envisagées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'action de Mme X...en responsabilité contre la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin pour manquement à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante lors de l'exécution d'ordres en bourse, l'arrêt rendu le 4 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X...la somme de 2 500 euros ; rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Florence X...de son action en responsabilité à l'encontre de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'AUVERGNE ET DU LIMOUSIN pour manquement à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante lors de l'exécution d'ordres en bourse et d'avoir rejeté, en conséquence, sa demande en paiement de dommages-intérêts en complément des 7. 000 € qui lui avaient été alloués en réparation de son préjudice résultant de la mauvaise exécution des ordres en bourse ;
AUX MOTIFS QUE, 1) Sur l'obligation d'information et de mise en garde de la Caisse, Madame X...a ouvert un plan d'épargne en actions (PEA) auprès de la Caisse le 10 novembre 2000, ce plan étant constitué d'un compte-titres et d'un compte numéraire ; que le contrat d'ouverture de ce plan précise que Madame X...reconnaît avoir reçu de la Caisse une note d'informations générales ainsi qu'une note d'informations particulières l'informant des dispositions régissant le PEA ; que les dispositions contractuelles issues de la « convention de conservation de compte d'instruments financiers » révèlent que Madame X...a fait le choix de gérer son portefeuille d'instruments financiers sous son entière responsabilité ; qu'elle décidait ainsi du choix des produits financiers sur lesquels elle investissait son épargne, les achats de titres étant opérés directement par ses soins au moyen du service internet mis à sa disposition, la Caisse n'étant tenue qu'aux obligations liées à la conservation et à la tenue du compte et à la réception-transmission d'ordres ; qu'aucun mandat n'a été donné par Madame X...à la Caisse pour la gestion de son portefeuille de titres ; que Madame X...exerce la profession d'institutrice ; qu'elle doit être considérée comme un investisseur non averti, la Caisse ne démontrant pas que l'intéressée justifierait d'une expérience particulière en matière d'intervention sur les marchés financiers qui pourrait la dispenser ou alléger son obligation d'information et de mise en garde en ce domaine ; que la « convention de conservation de compte d'instruments financiers » mentionne en caractère gras figurant en préambule des conditions générales que « l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés » ; que ces termes apparaissent suffisants pour mettre en garde un particulier, même non averti, sur les risques inhérents aux spéculations sur les marchés financiers, dès lors qu'il s'en déduit nécessairement le risque de perte de l'investissement réalisé ; que la Caisse a ainsi satisfait à son obligation d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte de Madame X...; qu'en outre, l'avenant à la convention des forfaits de services de la Caisse mentionne que « le client s'engage expressément, avant de passer ses ordres par Internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer, quelle que soit sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissement financier et il accepte le niveau de risque propre à ce type d'opération » ; qu'il s'ensuit qu'avant chaque opération en bourse, Madame X...pouvait accéder à des informations propres à l'éclairer sur les caractéristiques des titres sur lesquels elle envisageait d'investir et sur le niveau de risque de son opération ; que la convention stipule qu'un avis d'opéré doit être adressé par la Caisse à son client après réalisation des ordres donnés ; que la Caisse produit les avis d'opéré qu'elle a adressés à Madame X..., démontrant ainsi qu'elle a satisfait à cette obligation ; enfin, qu'informé du projet de Madame X...de solder son plan d'épargne logement pour effectuer un placement boursier, Monsieur Yves Y..., alors responsable clientèle de la Caisse, atteste avoir fait part de ses réserves en appelant l'attention de sa cliente sur le caractère aléatoire de ce placement (capital et taux non garantis) ; que malgré ces réserves, Madame X...a réalisé son projet de placement ; qu'au vu de ces éléments, la banque a satisfait à son obligation d'information et de mise en garde vis-à-vis de sa cliente, tant lors de l'ouverture du compte que pendant le fonctionnement de celui-ci ; 2) Sur l'obligation de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante à l'occasion de la passation d'ordres en bourse, que, contrairement à ce qui est soutenu par la Caisse, cette question se trouve soumise à la juridiction de renvoi puisqu'elle est concernée par la cassation partielle de l'arrêt de la Cour d'appel de Bourges rejetant la demande complémentaire de dommages-intérêts, même si cette cassation est intervenue sans que la Cour de cassation ait eu à examiner les critiques du moyen dirigées contre les motifs de l'arrêt retenant l'absence de faute de la Caisse en ce domaine ; que la convention de compte titres PEA signée par Madame X...mentionne (article 5. 2) que la Caisse s'engage à exécuter les ordres de ses clients dans le respect notamment des règles de couverture des ordres de bourse, le client s'engageant à maintenir constamment une couverture globale suffisante pour satisfaire aux règles de couverture en vigueur, à défaut de quoi la Caisse procède à la liquidation des engagements ; que l'article 7 de cette convention précise que, sauf convention expresse entre la Caisse et le donneur d'ordre, tous les instruments financiers conservés sur le ou les comptes du donneur d'ordre sont affectés de plein droit à titre de couverture à la garantie de tous ses engagements ; que c'est donc à juste titre que la Caisse a vérifié l'existence d'une couverture suffisante en prenant en considération l'ensemble des comptes de Madame X...(y compris le livret A, LEP, CEL) ; que le tableau du taux de couverture produit par la Caisse démontre que Madame X...justifiait d'une couverture suffisante lors de l'exécution de ses ordres en bourse ; qu'il s'ensuit qu'aucune faute ne peut être reprochée à la Caisse de ce chef ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu, en l'absence de manquement de la Caisse à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante, à allouer à Madame X...des dommages-intérêts en sus de ceux qui lui ont été accordés au titre de la mauvaise exécution par la Caisse de ses ordres en bourse ;
1) ALORS QUE le prestataire de services d'investissement est tenu, dès l'origine des relations contractuelles et quelle que soit la nature de celles-ci, de mettre en garde son client contre les risques encourus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme, hors le cas où celui-ci est un opérateur averti ; qu'en l'espèce, la cour de renvoi a explicitement constaté que Madame X...était un investisseur non averti ; que cependant, pour dire que la Caisse avait satisfait à son obligation d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte de Madame X..., elle s'est bornée à retenir que la convention de conservation de compte d'instruments financiers mentionnait en caractère gras figurant en préambule des conditions générales que « l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés » et que l'avenant à la convention des forfaits de service de la Caisse stipulait que « le client s'engage expressément avant de passer ses ordres par internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer quelles que soient sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissements financiers et il accepte le niveau de risque propre à ce genre d'opérations » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs desquels il ne résulte ni que la Caisse avait, lors de l'ouverture du compte de titres, mis en garde Madame X...contre les risques encourus dans les opérations spéculatives envisagées, ni que cette dernière, investisseur profane, avait d'ores et déjà une connaissance de ces risques dispensant la CAISSE D'ÉPARGNE de cette obligation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2) ALORS QUE les juges du fond sont liés par les prétentions respectives des parties telles que fixées dans leurs conclusions et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; que dès lors, en fondant sa décision sur l'affirmation selon laquelle « la Caisse produit les avis d'opéré qu'elle a adressé à Madame X..., démontrant ainsi qu'elle a satisfait à cette obligation », bien que dans ses conclusions d'appel, la CAISSE D'ÉPARGNE prétendait inexactement que Madame X...versait elle-même les avis d'opérés aux débats et que l'exposante soutenait, au contraire, qu'elle n'avait reçu aucun avis d'opéré de la Caisse l'informant de la situation réelle de ses comptes, ainsi que de l'insuffisance ou de l'absence de couverture des opérations passées en bourse, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des documents non soumis au débat contradictoire ; qu'en l'espèce ni les conclusions d'appel des parties ni les bordereaux de communication de pièces annexés n'établissaient que les avis d'opérés prétendument adressés par la Caisse à l'exposante aient été versés contradictoirement aux débats ; qu'en se fondant néanmoins sur ces documents, la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du Code de procédure civile ;
4) ALORS QU'en se fondant, en outre, pour écarter la responsabilité de la CAISSE D'ÉPARGNE, sur les seules déclarations du salarié de celle-ci, Monsieur Y..., conseiller financier directement responsable du manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil, qui alléguait avoir émis des réserves, en mai 2003, sur le bien-fondé de la résiliation du Plan d'Épargne Logement de Madame X...afin de réaliser un investissement boursier, cependant que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
5) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Madame X...soutenait que dans le tableau qu'elle versait aux débats pour prétendre avoir respecté l'obligation de couverture des opérations de bourse mise à sa charge, la CAISSE D'ÉPARGNE additionnait : les livret A, LEP, CEL et PEL (colonne 1 à 4) au compte-dépôt personnel (colonne 5), alors qu'il s'agissait de comptes d'épargne, dont les fonds étaient, pour la plupart, bloqués pour plusieurs années et qui, pour cette raison, n'entraient pas dans le calcul du taux réglementaire de couverture ; que dès lors en ne répondant pas à ce moyen, pourtant de nature à démontrer l'insuffisance de couverture des ordres passés, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Madame X...soutenait également que dans le tableau qu'elle versait aux débats pour prétendre avoir respecté l'obligation de couverture des opérations de bourse mise à sa charge, la CAISSE D'ÉPARGNE faisait figurer dans la colonne « titre valorisés », en date du 3 mai 2004, le montant de 34. 331, 72 € correspondant à des titres achetés avec SRD (service de règlement différé), titres qui n'avaient pas été prorogés sur le mois suivant, de sorte qu'ils avaient dû être payés en fin de mois et que la banque aurait dû, en conséquence, les déduire de son compte personnel ; que dès lors en ne répondant pas à ce moyen, propre à démontrer l'insuffisance de couverture des ordres passés, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Analyse
Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges , du 4 mai 2011
Bref propos sur l'institutrice de Moulins et mention de la Chronique de droit bancaire
Nous avions alors dit que le calvaire de l'institutrice de Moulins méritait de remplacer l'image d'Epinal que s'était faite la Veuve de Carpentras", rien que cela pour signaler les difficultés des juges à trancher ces litiges.
On avoue avoir un peu de retard sur cet arrêt, manifestement la Cour de cassation a voulu rapidement effacer l'arrêt de la Cour d'appel de Limoges rendu en formation solennelle sous la présidence du Premier président... Tout un symbole !
Extrait de LEGIFRANCE
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 12 juin 2012
N° de pourvoi: 11-21661
Non publié au bulletin Cassation partielle
M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président), président
SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que le prestataire de services d'investissement est tenu, dès l'origine des relations contractuelles et quelle que soit la nature de celles-ci, de mettre en garde son client contre les risques encourus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme, hors le cas où ce dernier en a connaissance ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 13 juillet 2010, pourvoi n° 09-69. 638), que Mme X..., titulaire de divers comptes ouverts auprès de la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin (la Caisse), laquelle lui avait consenti un prêt immobilier, a ouvert auprès de celle-ci un compte-titres et a réalisé, via le service internet mis à sa disposition, des opérations d'achat et de vente de titres avec service de règlement différé ; que la Caisse ayant fait assigner sa cliente en paiement de certaines sommes au titre du solde débiteur de son compte courant et du solde du prêt immobilier, Mme X...a soutenu que la Caisse avait engagé sa responsabilité à son égard ;
Attendu que pour écarter la faute tirée de l'absence d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte, l'arrêt retient que la " convention de conservation de compte d'instruments financiers " mentionne en caractères gras, figurant en préambule des conditions générales, que " l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés " et qu'il s'en déduit nécessairement le risque de perte de l'investissement réalisé ; que l'arrêt ajoute que l'avenant à la convention des forfaits de service de la Caisse mentionne que " le client s'engage expressément, avant de passer ses ordres par internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer, quelles que soient sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissement financier et il accepte le niveau de risque propre à ce type d'opérations " ; qu'il en déduit qu'avant chaque opération en bourse, Mme X...pouvait accéder à des informations propres à l'éclairer sur les caractéristiques des titres sur lesquels elle envisageait d'investir et sur le niveau de risque de son opération ; que l'arrêt relève encore que le responsable clientèle de la Caisse atteste qu'informé du projet de Mme X...de solder son plan d'épargne logement pour effectuer un placement boursier, il a fait part de ses réserves en appelant l'attention de sa cliente sur le caractère aléatoire de ce placement ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que la Caisse avait, lors de l'ouverture du compte-titres, mis en garde Mme X...contre les risques encourus dans les opérations spéculatives envisagées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'action de Mme X...en responsabilité contre la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin pour manquement à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante lors de l'exécution d'ordres en bourse, l'arrêt rendu le 4 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la Caisse d'épargne et de prévoyance d'Auvergne et du Limousin aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Mme X...la somme de 2 500 euros ; rejette sa demande ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juin deux mille douze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Florence X...de son action en responsabilité à l'encontre de la CAISSE D'ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE D'AUVERGNE ET DU LIMOUSIN pour manquement à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante lors de l'exécution d'ordres en bourse et d'avoir rejeté, en conséquence, sa demande en paiement de dommages-intérêts en complément des 7. 000 € qui lui avaient été alloués en réparation de son préjudice résultant de la mauvaise exécution des ordres en bourse ;
AUX MOTIFS QUE, 1) Sur l'obligation d'information et de mise en garde de la Caisse, Madame X...a ouvert un plan d'épargne en actions (PEA) auprès de la Caisse le 10 novembre 2000, ce plan étant constitué d'un compte-titres et d'un compte numéraire ; que le contrat d'ouverture de ce plan précise que Madame X...reconnaît avoir reçu de la Caisse une note d'informations générales ainsi qu'une note d'informations particulières l'informant des dispositions régissant le PEA ; que les dispositions contractuelles issues de la « convention de conservation de compte d'instruments financiers » révèlent que Madame X...a fait le choix de gérer son portefeuille d'instruments financiers sous son entière responsabilité ; qu'elle décidait ainsi du choix des produits financiers sur lesquels elle investissait son épargne, les achats de titres étant opérés directement par ses soins au moyen du service internet mis à sa disposition, la Caisse n'étant tenue qu'aux obligations liées à la conservation et à la tenue du compte et à la réception-transmission d'ordres ; qu'aucun mandat n'a été donné par Madame X...à la Caisse pour la gestion de son portefeuille de titres ; que Madame X...exerce la profession d'institutrice ; qu'elle doit être considérée comme un investisseur non averti, la Caisse ne démontrant pas que l'intéressée justifierait d'une expérience particulière en matière d'intervention sur les marchés financiers qui pourrait la dispenser ou alléger son obligation d'information et de mise en garde en ce domaine ; que la « convention de conservation de compte d'instruments financiers » mentionne en caractère gras figurant en préambule des conditions générales que « l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés » ; que ces termes apparaissent suffisants pour mettre en garde un particulier, même non averti, sur les risques inhérents aux spéculations sur les marchés financiers, dès lors qu'il s'en déduit nécessairement le risque de perte de l'investissement réalisé ; que la Caisse a ainsi satisfait à son obligation d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte de Madame X...; qu'en outre, l'avenant à la convention des forfaits de services de la Caisse mentionne que « le client s'engage expressément, avant de passer ses ordres par Internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer, quelle que soit sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissement financier et il accepte le niveau de risque propre à ce type d'opération » ; qu'il s'ensuit qu'avant chaque opération en bourse, Madame X...pouvait accéder à des informations propres à l'éclairer sur les caractéristiques des titres sur lesquels elle envisageait d'investir et sur le niveau de risque de son opération ; que la convention stipule qu'un avis d'opéré doit être adressé par la Caisse à son client après réalisation des ordres donnés ; que la Caisse produit les avis d'opéré qu'elle a adressés à Madame X..., démontrant ainsi qu'elle a satisfait à cette obligation ; enfin, qu'informé du projet de Madame X...de solder son plan d'épargne logement pour effectuer un placement boursier, Monsieur Yves Y..., alors responsable clientèle de la Caisse, atteste avoir fait part de ses réserves en appelant l'attention de sa cliente sur le caractère aléatoire de ce placement (capital et taux non garantis) ; que malgré ces réserves, Madame X...a réalisé son projet de placement ; qu'au vu de ces éléments, la banque a satisfait à son obligation d'information et de mise en garde vis-à-vis de sa cliente, tant lors de l'ouverture du compte que pendant le fonctionnement de celui-ci ; 2) Sur l'obligation de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante à l'occasion de la passation d'ordres en bourse, que, contrairement à ce qui est soutenu par la Caisse, cette question se trouve soumise à la juridiction de renvoi puisqu'elle est concernée par la cassation partielle de l'arrêt de la Cour d'appel de Bourges rejetant la demande complémentaire de dommages-intérêts, même si cette cassation est intervenue sans que la Cour de cassation ait eu à examiner les critiques du moyen dirigées contre les motifs de l'arrêt retenant l'absence de faute de la Caisse en ce domaine ; que la convention de compte titres PEA signée par Madame X...mentionne (article 5. 2) que la Caisse s'engage à exécuter les ordres de ses clients dans le respect notamment des règles de couverture des ordres de bourse, le client s'engageant à maintenir constamment une couverture globale suffisante pour satisfaire aux règles de couverture en vigueur, à défaut de quoi la Caisse procède à la liquidation des engagements ; que l'article 7 de cette convention précise que, sauf convention expresse entre la Caisse et le donneur d'ordre, tous les instruments financiers conservés sur le ou les comptes du donneur d'ordre sont affectés de plein droit à titre de couverture à la garantie de tous ses engagements ; que c'est donc à juste titre que la Caisse a vérifié l'existence d'une couverture suffisante en prenant en considération l'ensemble des comptes de Madame X...(y compris le livret A, LEP, CEL) ; que le tableau du taux de couverture produit par la Caisse démontre que Madame X...justifiait d'une couverture suffisante lors de l'exécution de ses ordres en bourse ; qu'il s'ensuit qu'aucune faute ne peut être reprochée à la Caisse de ce chef ; qu'il résulte de ce qui précède qu'il n'y a pas lieu, en l'absence de manquement de la Caisse à ses obligations d'information, de mise en garde et de vérification de l'existence d'une couverture financière suffisante, à allouer à Madame X...des dommages-intérêts en sus de ceux qui lui ont été accordés au titre de la mauvaise exécution par la Caisse de ses ordres en bourse ;
1) ALORS QUE le prestataire de services d'investissement est tenu, dès l'origine des relations contractuelles et quelle que soit la nature de celles-ci, de mettre en garde son client contre les risques encourus dans les opérations spéculatives sur les marchés à terme, hors le cas où celui-ci est un opérateur averti ; qu'en l'espèce, la cour de renvoi a explicitement constaté que Madame X...était un investisseur non averti ; que cependant, pour dire que la Caisse avait satisfait à son obligation d'information et de mise en garde lors de l'ouverture du compte de Madame X..., elle s'est bornée à retenir que la convention de conservation de compte d'instruments financiers mentionnait en caractère gras figurant en préambule des conditions générales que « l'attention du titulaire est en particulier attirée sur les risques liés au caractère spéculatif de certains marchés » et que l'avenant à la convention des forfaits de service de la Caisse stipulait que « le client s'engage expressément avant de passer ses ordres par internet, à prendre connaissance de l'information relative aux opérations qu'il souhaite effectuer quelles que soient sa compétence professionnelle ou son expérience particulière en matière d'investissements financiers et il accepte le niveau de risque propre à ce genre d'opérations » ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs desquels il ne résulte ni que la Caisse avait, lors de l'ouverture du compte de titres, mis en garde Madame X...contre les risques encourus dans les opérations spéculatives envisagées, ni que cette dernière, investisseur profane, avait d'ores et déjà une connaissance de ces risques dispensant la CAISSE D'ÉPARGNE de cette obligation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
2) ALORS QUE les juges du fond sont liés par les prétentions respectives des parties telles que fixées dans leurs conclusions et ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; que dès lors, en fondant sa décision sur l'affirmation selon laquelle « la Caisse produit les avis d'opéré qu'elle a adressé à Madame X..., démontrant ainsi qu'elle a satisfait à cette obligation », bien que dans ses conclusions d'appel, la CAISSE D'ÉPARGNE prétendait inexactement que Madame X...versait elle-même les avis d'opérés aux débats et que l'exposante soutenait, au contraire, qu'elle n'avait reçu aucun avis d'opéré de la Caisse l'informant de la situation réelle de ses comptes, ainsi que de l'insuffisance ou de l'absence de couverture des opérations passées en bourse, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du Code de procédure civile ;
3) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur des documents non soumis au débat contradictoire ; qu'en l'espèce ni les conclusions d'appel des parties ni les bordereaux de communication de pièces annexés n'établissaient que les avis d'opérés prétendument adressés par la Caisse à l'exposante aient été versés contradictoirement aux débats ; qu'en se fondant néanmoins sur ces documents, la Cour d'appel a violé le principe de la contradiction et l'article 16 du Code de procédure civile ;
4) ALORS QU'en se fondant, en outre, pour écarter la responsabilité de la CAISSE D'ÉPARGNE, sur les seules déclarations du salarié de celle-ci, Monsieur Y..., conseiller financier directement responsable du manquement de la banque à son obligation d'information et de conseil, qui alléguait avoir émis des réserves, en mai 2003, sur le bien-fondé de la résiliation du Plan d'Épargne Logement de Madame X...afin de réaliser un investissement boursier, cependant que nul ne peut se constituer de preuve à soi-même, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
5) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Madame X...soutenait que dans le tableau qu'elle versait aux débats pour prétendre avoir respecté l'obligation de couverture des opérations de bourse mise à sa charge, la CAISSE D'ÉPARGNE additionnait : les livret A, LEP, CEL et PEL (colonne 1 à 4) au compte-dépôt personnel (colonne 5), alors qu'il s'agissait de comptes d'épargne, dont les fonds étaient, pour la plupart, bloqués pour plusieurs années et qui, pour cette raison, n'entraient pas dans le calcul du taux réglementaire de couverture ; que dès lors en ne répondant pas à ce moyen, pourtant de nature à démontrer l'insuffisance de couverture des ordres passés, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
6) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, Madame X...soutenait également que dans le tableau qu'elle versait aux débats pour prétendre avoir respecté l'obligation de couverture des opérations de bourse mise à sa charge, la CAISSE D'ÉPARGNE faisait figurer dans la colonne « titre valorisés », en date du 3 mai 2004, le montant de 34. 331, 72 € correspondant à des titres achetés avec SRD (service de règlement différé), titres qui n'avaient pas été prorogés sur le mois suivant, de sorte qu'ils avaient dû être payés en fin de mois et que la banque aurait dû, en conséquence, les déduire de son compte personnel ; que dès lors en ne répondant pas à ce moyen, propre à démontrer l'insuffisance de couverture des ordres passés, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Analyse
Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges , du 4 mai 2011