
Il y a plusieurs décennies que la notion d'écrit m'effraye. Le Code civil a bien progressé, mais sans doute pas assez. La notion d'écrit suscite des errements. Avoir essayé de démontrer que l'écrit pouvait être autre chose que du papier dans ma thèse faisait passer pour irréaliste (la loi de juin 2024 sur le titre transférable électronique en prend acte avec des décennies de retard).
L'incompréhension règne dans les ministères sur le sujet de l'écrit.
Sans doute ne sont-ils pas aider par la finesse du droit européen... souvent à transposer voire à suivre à la lettre. Ainsi un décret peut poser :
"Tout contrat entre un prêteur et un porteur de projet est établi par écrit ou sur tout autre support durable." (art. R. 548-8, CMF, texte sur le financement participatif).
Dans cette disposition, il y a une formule curieuse, "par écrit ou sur tout autre support durable". Le support durable est défini (1).
Il me souvient, je ne vérifie pas, qu'elle est assez souvent reproduite (pour le CMF : art. D. 514-9, R. 519-26).
Reprenons l'affaire.
Le support ordinaire de l'écrit est le papier. Chez le notaire, chez l'avocat ou entre nous. Le papier ! C'est un support assez durable. Le papier support assez durable s'oppose donc à "support durable".
Mais donc le décret cité ne va pas (sans doute comme bien d'autres). Le mot "écrit" ne s'oppose pas à "support durable" comme le susurre le décret.
Il y a pire, si du moins on le peut : c'est que finalement cet emploi parle de "support durable" pour désigner un écrit, soit des chiffres et des lettres qui traduisent une pensée. Voilà où la règle adoptée à grand frais peut conduire : effacer la pensée.
Comment cela peut-il échapper aux services d'un ministère qui rédige le projet de décret ? Ah... ce n'est pas dans un ministère que cela a été rédigé... ?!
Petite re-rédaction :
Tout contrat entre un prêteur et un porteur de projet est établi par écrit sur un support durable, soit sur support papier ou support informatique, soit sur tout autre support devenu usuel...
On devrait arriver à cette rédaction évidente d'ici vingt ou trente ans. Tout prend beaucoup de temps. On peut donc encore réfléchir à l'écrit, et désormais au support durable qui... vous savez quoi ? Contient des écrits tel "des PDF".
L'accélération de l'histoire est à nuancer.
________
1) CMF, article L 311-7 :
"Constitue un support durable, au sens du présent titre, tout instrument offrant au client ou au professionnel la possibilité de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement afin de pouvoir s'y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées, et qui permet la reproduction à l'identique des informations conservées."
L'incompréhension règne dans les ministères sur le sujet de l'écrit.
Sans doute ne sont-ils pas aider par la finesse du droit européen... souvent à transposer voire à suivre à la lettre. Ainsi un décret peut poser :
"Tout contrat entre un prêteur et un porteur de projet est établi par écrit ou sur tout autre support durable." (art. R. 548-8, CMF, texte sur le financement participatif).
Dans cette disposition, il y a une formule curieuse, "par écrit ou sur tout autre support durable". Le support durable est défini (1).
Il me souvient, je ne vérifie pas, qu'elle est assez souvent reproduite (pour le CMF : art. D. 514-9, R. 519-26).
Reprenons l'affaire.
Le support ordinaire de l'écrit est le papier. Chez le notaire, chez l'avocat ou entre nous. Le papier ! C'est un support assez durable. Le papier support assez durable s'oppose donc à "support durable".
Mais donc le décret cité ne va pas (sans doute comme bien d'autres). Le mot "écrit" ne s'oppose pas à "support durable" comme le susurre le décret.
Il y a pire, si du moins on le peut : c'est que finalement cet emploi parle de "support durable" pour désigner un écrit, soit des chiffres et des lettres qui traduisent une pensée. Voilà où la règle adoptée à grand frais peut conduire : effacer la pensée.
Comment cela peut-il échapper aux services d'un ministère qui rédige le projet de décret ? Ah... ce n'est pas dans un ministère que cela a été rédigé... ?!
Petite re-rédaction :
Tout contrat entre un prêteur et un porteur de projet est établi par écrit sur un support durable, soit sur support papier ou support informatique, soit sur tout autre support devenu usuel...
On devrait arriver à cette rédaction évidente d'ici vingt ou trente ans. Tout prend beaucoup de temps. On peut donc encore réfléchir à l'écrit, et désormais au support durable qui... vous savez quoi ? Contient des écrits tel "des PDF".
L'accélération de l'histoire est à nuancer.
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1) CMF, article L 311-7 :
"Constitue un support durable, au sens du présent titre, tout instrument offrant au client ou au professionnel la possibilité de stocker des informations qui lui sont adressées personnellement afin de pouvoir s'y reporter ultérieurement pendant un laps de temps adapté aux fins auxquelles les informations sont destinées, et qui permet la reproduction à l'identique des informations conservées."