Humanisme et raison juridique, #directdroit par Hervé CAUSSE

Répondre à la question, sans transformer le sujet. De la Faculté à la vie professionnelle : répondre à la question. Remarques en forme de "presque-corrections"...



Répondre à la question, sans transformer le sujet. De la Faculté à la vie professionnelle : répondre à la question. Remarques en forme de "presque-corrections"...
Ton sujet tu ne tueras point. Lorsque le sujet est tiré il faut le traiter, sans le déformer. Une majorité d'étudiants ne veut pas admettre que tout sujet a son identité. Que tout terme du sujet mérite attention, explication et décision. Les étudiants ne s'interrogent souvent pas sur le sujet, ce qui doit être l'objet d'une introduction. Du coup, ils répondent à une question qu'ils ont en tête mais non à celle qui est sur le papier. Prenons quelques exemples (toute ressemblance avec des faits récents est parfaitement voulue et assumée).

Le sujet "les cessions de parts sociales de SARL" se transforme en sujet "l'agrément dans les cessions de parts sociales de SARL". Dans le second sujet, il est logique de ne pas parler de la nature de la cession (civile ou commerciale, cession ou vente, acte extra-statutaire mais lié aux statuts), ce qui peut être grosso modo également vu sous les idées de notion ou définition de la cession. Manifestement, le sujet n'est pas le même, alors surtout que l'agrément n'est qu'un mécanisme de la réalisation de l'opération ; le premier sujet conduit plutôt à : I. Définition de l'opération II. Réalisation de l'opération. Cela peut être une note de 3 pages à un dirigeant social qui ne connaît pas la question, ce peut aussi être une dissertation de licence de droit...

Prenez un autre sujet, presque trop classique pour être honnête : la nature juridique de la lettre de change. Une série de termes et expressions la décrivent qui seront autant de I, de II et de A et B du devoir à venir. Hors de ces mots et expressions, point de "nature" de la lettre de change discutée ! La lettre de change (et non de chance !) est : un titre, un écrit, un acte juridique, un effet de commerce, un acte de commerce par nature, un titre de paiement, un titre de crédit, un titre négociable... la construction du devoir passe par la combinaison de ces "grandes vérités" qui permettent de composer au moins 2 ou 3 plans qui, différents, permettent tous de traiter le sujet. Pourquoi ne retrouve-t-on ces réalités que sur une moitié ou un quart du devoir ? Sur un A ou un B ? Faut-il noter alors le devoir sur une moitié, sur 10, ou sur un quart, sur 5 ?

Chers étudiants, pitié pour le correcteur que vous instituez en bourreau !

Autre question, autre sujet, autre déformation : la présentation d'un site internet offrant de conclure des contrats électroniques. Le sujet est transformé en : les informations légales à publier sur un site internet... Le premier sujet exige une réflexion, un tri et un ordonnancement, le second pousse à une récitation dont la vacuité pousse au passage à ne guère ordonner les idées tellement leur platitude ne permet pas de s'embrouiller ; le non-traitement du sujet s'accompagne d'une absence de forme du propos ! La première question est proche de celle qu'un professionnel pose au juriste. Il sait a peu près les mentions, mais il se demande comment présenter (le mot du sujet !!!) son site. Le "vrai droit" est celui qui est "mixé" à un intérêt pratique. Viennent alors les idées de savoir comment on organise les diverses pages, à commencer par le première (une inconnue des étudiants : la page d'accueil !), les cases à renseigner, les rubriques (souvent latérales, avec une nécessaire rubrique "termes contractuels, conditions générales", les liens, les pages dupliquées pour permettre le double clic (le mécanisme de changement/saut de page après le premier clic de la "commande")... Tout cela pose des questions de "présentation", soit de forme, voire de mise en forme. Mixer cette question de la présentation nécessaire avec les informations à produire, voilà qui est alors pertinent.

Répondre au question à la Faculté c'est démontrer qu'on pourra y répondre dans la vie pratique, que l'on soit juriste d'une organisation, en cabinet, dans une administration ou en tant que juge. Quelle que soit l'épreuve, il s'agit toujours de répondre à la question. Un arrêt répond toujours à une question. Le texte d'un auteur parle toujours d'un problème. Un article de loi règle toujours une difficulté. Une dissertation suggère toujours quelques questions à régler... A ces questions, problèmes et difficultés il faut une réponse ! Pour cette raison, ce que chasse le correcteur, "au-delà" du contrôle des connaissances, c'est le manque de pertinence de l'auteur d'une copie incapable de répondre à une question : des tonnes de connaissances ne sont rien sans une once de pertinence.

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