Qu'est-ce que le système ? Benoît APPARU (LR) et Elisabeth MARTICHOUX (RTL) nous embrouillent.



Qu'est-ce que le système que dénoncent divers candidats à la présidentielle ? Sur RTL on peut dire tout et son contraire en moins de deux minutes, c'était le cas mardi matin 4 avril : Benoit APPARU, député LR, et Elisabeth MARTICHOUX, nous ont embrouillé.

L'invité répond à la deuxième question : "Je note que tout le monde est contre le système. je ne sais d'ailleurs pas ce qu'est le système. Le PEN est contre le système. MACRON est contre le système...". Quelques secondes passent et le député de dire : "On a tort de scier la branche sur laquelle on est assis. Jusqu'à preuve du contraire, le système c'est justement la démocratie."

Avec un tel discours, on tourne en rond sans traiter le sujet !

Ce matin, dans la même émission, Gilbert COLLARD critique délicatement l'Université qui selon lui "murmure" (il désigne ainsi le vide idéologique actuel) ; voilà qui nous invite à murmurer clair, car Gilbert COLLARD, lui, a l'éloquence obscure. Il n'a pas répondu à la question de E. MARTICHOUX : peut-on renoncer à son droit d'immunité pour se rendre à une convocation judiciaire ?

Bon, quid du système ? Indiquons clairement ce qu'est le système, et pourquoi on en parle à savoir les points à améliorer. Si l'amélioration n'est pas possible, il faut avoir une discours de rupture, de révolution.

Qu'est-ce que le système dont parlent les candidats, les journalistes et ... les électeurs ?


Aperçu sur le système, système politique et non démocratique

"Le système" est le système des pratiques politiques, soit l'organisation publique (constitutionnelle et légale) complétée de certaines pratiques politiques qui relèvent du droit privé]b (la création et le fonctionnement des partis politiques qui sont des personnes privées, le financement de ces partis par des dons, le militantisme, l'emploi d'un assistant parlementaire qui s'opère par un contrat de travail de droit privé).

Le système des pratiques politiques dépasse les principes du système démocratique, celui de la pure organisation politique. Le système dépasse la démocratie. C'est dans ce dépassement que plusieurs problèmes existent - tout citoyen le voit sans être un expert.


Aperçu sur le système des pratiques politiques

Certaines pratiques sont mixtes, publiques et privées :

- le pantouflage est le droit pour un haut fonctionnaire de se mettre en disponibilité de l'administration tout en allant dans le secteur privé, la garantie du retour dans un emploi est un avantage mais il pose problème à la sortie de l'administration ou à son retour dans l'administration (comment éviter les conflits d'intérêts) ; les Français peuvent juger cela inacceptable, alors surtout que les postes occupés dans le privé ne sont pas risqués et sont souvent très rémunérés : ils voient l'administration entravée et en plus obligée de traiter des problèmes liés aux avantages de certains ;

- l'emploi d'assistants parlementaires occupe un personnel politique payé par des fonds publics et un employé soumis au droit privé ; le dispositif est subtil : on ne sait pas si un député est dépositaire de l'autorité publique, condition absolument nécessaire pour que le délit de détournement de fonds publics s'applique, sans qu'un précédent cas d'emploi fictif puisse donner la solution du cas F. FILLON, contrairement à ce que dit le Pr. LETTERON (1).

Certaines pratiques sont publiques :

- les ministres sont soucieux de placer leurs collaborateurs qui, bien payés, auront en plus une place réservée par la République ;
- les ministres font pareil pour eux-mêmes, c'est le cas actuellement : certains s'emploient davantage à une auto-nomination par le gouvernement qu'à liquider leurs dossiers ;
- les dépenses excessives car les personnel politique a des moyens importants (aucun ministre ne prend jamais un taxi), l'usage des avions est souvent pointé du doigt ;
- les nominations des politiques qui sortent d'un gouvernement pour entrer au Conseil constitutionnel laissent également pantois, l'ancien ministre juge les lois de ses anciens collègues de gouvernement, sans en outre être juriste ;
- le cumul des mandats a également fait des ravages, mais cela est terminé.


Certaines pratiques sont privées :

- les partis politiques sont des personnes privées, des associations ; mais elles sont financées ou refinancées par des fonds publics, ce qui apparaît un peu curieux (au JO du 7 février 2017 on compte 315 partis politique en France !) ;
- les candidats aux élections sont financés par les partis, le nombre de candidats aux législatives permettant de participer au financement public impliquant parfois des candidatures fictives ;
- l'ouverture par un / une élu-e (en exercice) d'un cabinet d'avocat (sans avoir le CAPA... bien sûr) ou d'un cabinet de conseils, les conseils étant en réalité de la mise en relation ;
- on ne va pas s'étendre mais les groupes de pression dits lobbyistes peuvent aussi acheter les décideurs publics, de cent façons...


Voilà un bref résumé des problèmes que pose le système.

Le système qui fonctionne contre la démocratie fait naturellement l'unanimité contre lui.

C'est que, à tous les étages, les moeurs et pratiques sont relâchées et abusent de l'imprécision des règles. Ce n'est pas un hasard si un député ou un sénateur peut raisonnablement ne pas être considéré comme un dépositaire de l'autorité publique concerné par le délit de détournement de fonds publics, il y a un angle mort. Le système des pratiques politiques joue de tous les angles morts de la législation...

Autrement dit le système ne supporte plus la démocratie, il la méprise et l'affaiblit.

Je ne suis donc pas d'accord avec B. APPARU qui dit (in fine) que le système c'est la démocratie et que c'est la branche sur laquelle on est assis car les Français, eux, n'y sont pas assis.

Le système qui est dénoncé, ce n'est pas le pur système politique, c'est le système des pratiques politiques.

Il s'est détaché de la démocratie pour l'attaquer, délicatement, mais de façon persistante et en tous points.

Il y a donc bien un problème à traiter que le discours anti-système dénonce, certes de façon un peu confuse.


Une proposition de loi de moralité publique s'impose et, en vérité, aurait déjà pu être rédigée par nombre de candidats soutenus pas des dizaines de parlementaires !

Certaines pratiques des élus sont peu acceptables. On leur pardonnerait peut-être cela si leurs résultats étaient bons. Or, malgré des financement publics notables, la société craque de partout (certains magistrats et policiers n'ont pas de papier à mettre dans l'imprimante, des universitaires doivent payer leurs photocopies).

La classe politique, non content d'avoir l'air de se servir, a l'air de ne pas accomplir sa tâche.

Mais cela ne dure-t-il pas depuis quelques siècles ?

Les lois même réécrites suffisent-elles ?






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1) Blog de R. LETTERON
Naturellement, l'observation ne vaut pas analyse complète de cette question de droit pénal... politique ! Mais la qualification d'un parlementaire en "dépositaire de l'autorité publique" est pour le moins délicate contrairement à ce que soutient notre collègue. Personne n'a d'ailleurs invoqué un précédent concernant un député ou sénateur, alors même des abus semblent exister depuis longtemps. Le point factuel d'un précédent arrêt où un emploi fictif a été jugé comme une forme de détournement, que rapporte notre collègue, ne purge pas la difficulté si, ab initio, l'article 432-15 du code pénal ne s'applique pas.
Voyez les mêmes réserves et d'autres aspects de la difficulté sur le blog de Charles PRATS

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