Tout associé peut participer aux "assemblées générales", la Cour de cassation rappelle nettement, dans l'arrêt signalé et reproduit ci-dessous, ce droit de portée générale. Elle met les deux mots - assemblée générale - entre guillemets car c'est là, seulement, l'un des processus des décisions collectives - les guillemets sont d'autant plus justifiés que l'expression "assemblée des associés" serait plus pertinente.
Passons ces points, qui ne sont pas de l'ordre du détail, pour constater le rappel du principe.
Des associés, propriétaires indivis (les consorts X) de parts sociales qu'ils détenaient en nue-propriété, avaient donné un mandat conformément à la loi (art. 1844, C. civ.), pour exercer leurs droits, à M. Y, époux d'une des dames X.
Cette dame X, Mme Y, voulut assister à l'assemblée des associés de l'EARL ("entreprise agricole à responsabilité limitée). Pour éviter cela, les grands moyens furent déployés et la société l'assigna pour lui interdire d'assister à l'assemblée !
La désignation de ce mandataire laissa penser à la cour d'appel que les associés n'avaient donc pas/plus le droit d'assister à l'assemblée. Le juge d'appel raisonne dans une logique spéciale à l'assemblée : on participe pour voter. Il le peut d'autant mieux que les manuels n'ont pas toujours distinguer le droit de participer du droit de voter, les deux étant ordinairement exercés dans le même temps.
La Cour de cassation a alors l'occasion de dire, dans un raisonnement plus large, allant à la racine de la société, que le droit de participer dépasse le seul droit de vote. Une société a pour brique essentielle l'associé et, si les indivisaires ont besoin d'avoir un représentant, ont voit mal quelle intolérance conduirait à les exclure.
Participer cela veut dire assister, soit entendre, écouter et parler. Ainsi, la richesse du droit de participer ne se réduit pas à l'acte de vote qui justifie, en cas d'indivision, le mandataire commun. Ce dernier est en quelque sorte un mal nécessaire. En pratique, le représentant investi du droit de vote peut donc, quand il assiste à l'assemblée, enregistrer le "sentiment" des associés présents, et sans cacher son comportement, et ce bien qu'il ne s'agisse pas d'un "mandat impératif".
Ainsi, l'arrêt est justifié en droit, mais encore justifié en opportunité à raison du mandat ici en cause.
Bonne loi, bon arrêt, et bon vent aux parties !
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Extrait de LEGIFRANCE
C. Cass. chambre commerciale
Audience publique du mardi 21 janvier 2014
N° de pourvoi: 13-10151
Publié au bulletin Cassation
M. Espel (président), président
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1844, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la nue-propriété d'une partie des parts représentant le capital de la société civile Earl de Fauque (la société) est indivise entre Mme Chantal X..., épouse Y..., Mme Nadia X... et M. Jérôme X... ; que la société a fait assigner Mme Y... et M. Y..., son conjoint, à qui elle avait donné mandat de la représenter lors des assemblées d'associés, pour qu'il soit dit que Mme Y... n'a aucune qualité pour assister à ces assemblées et pour qu'il soit fait défense à Mme Y... de s'y faire assister ou représenter par son conjoint et, à ce dernier, de pénétrer au siège social ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que dès lors qu'un mandataire commun a été désigné pour représenter l'indivision X... aux « assemblées générales » de la société, il n'y a pas lieu de dissocier artificiellement la discussion préalable des points soumis au vote et le vote lui-même, qui participent d'une seule démarche intellectuelle, en sorte que la présence des indivisaires eux-mêmes aux assemblées générales est nécessairement exclue par la désignation d'un mandataire commun pour représenter l'indivision ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les copropriétaires indivis de droits sociaux ont la qualité d'associé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;
Passons ces points, qui ne sont pas de l'ordre du détail, pour constater le rappel du principe.
Des associés, propriétaires indivis (les consorts X) de parts sociales qu'ils détenaient en nue-propriété, avaient donné un mandat conformément à la loi (art. 1844, C. civ.), pour exercer leurs droits, à M. Y, époux d'une des dames X.
Cette dame X, Mme Y, voulut assister à l'assemblée des associés de l'EARL ("entreprise agricole à responsabilité limitée). Pour éviter cela, les grands moyens furent déployés et la société l'assigna pour lui interdire d'assister à l'assemblée !
La désignation de ce mandataire laissa penser à la cour d'appel que les associés n'avaient donc pas/plus le droit d'assister à l'assemblée. Le juge d'appel raisonne dans une logique spéciale à l'assemblée : on participe pour voter. Il le peut d'autant mieux que les manuels n'ont pas toujours distinguer le droit de participer du droit de voter, les deux étant ordinairement exercés dans le même temps.
La Cour de cassation a alors l'occasion de dire, dans un raisonnement plus large, allant à la racine de la société, que le droit de participer dépasse le seul droit de vote. Une société a pour brique essentielle l'associé et, si les indivisaires ont besoin d'avoir un représentant, ont voit mal quelle intolérance conduirait à les exclure.
Participer cela veut dire assister, soit entendre, écouter et parler. Ainsi, la richesse du droit de participer ne se réduit pas à l'acte de vote qui justifie, en cas d'indivision, le mandataire commun. Ce dernier est en quelque sorte un mal nécessaire. En pratique, le représentant investi du droit de vote peut donc, quand il assiste à l'assemblée, enregistrer le "sentiment" des associés présents, et sans cacher son comportement, et ce bien qu'il ne s'agisse pas d'un "mandat impératif".
Ainsi, l'arrêt est justifié en droit, mais encore justifié en opportunité à raison du mandat ici en cause.
Bonne loi, bon arrêt, et bon vent aux parties !
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Extrait de LEGIFRANCE
C. Cass. chambre commerciale
Audience publique du mardi 21 janvier 2014
N° de pourvoi: 13-10151
Publié au bulletin Cassation
M. Espel (président), président
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1844, alinéa 1er, du code civil ;
Attendu que tout associé a le droit de participer aux décisions collectives ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la nue-propriété d'une partie des parts représentant le capital de la société civile Earl de Fauque (la société) est indivise entre Mme Chantal X..., épouse Y..., Mme Nadia X... et M. Jérôme X... ; que la société a fait assigner Mme Y... et M. Y..., son conjoint, à qui elle avait donné mandat de la représenter lors des assemblées d'associés, pour qu'il soit dit que Mme Y... n'a aucune qualité pour assister à ces assemblées et pour qu'il soit fait défense à Mme Y... de s'y faire assister ou représenter par son conjoint et, à ce dernier, de pénétrer au siège social ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que dès lors qu'un mandataire commun a été désigné pour représenter l'indivision X... aux « assemblées générales » de la société, il n'y a pas lieu de dissocier artificiellement la discussion préalable des points soumis au vote et le vote lui-même, qui participent d'une seule démarche intellectuelle, en sorte que la présence des indivisaires eux-mêmes aux assemblées générales est nécessairement exclue par la désignation d'un mandataire commun pour représenter l'indivision ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les copropriétaires indivis de droits sociaux ont la qualité d'associé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen, autrement composée ;