Voilà un arrêt riche de notions et de péripéties qui pousse à vérifier nombre de notions assez difficiles qui tournent autour de la question du capital social, ce qui exige de réviser avec en mains un ouvrage de droit des sociétés et le Code de commerce. L'arrêt attaqué a, à bon droit, annulé l'augmentation de capital litigieuse juge la Cour de cassation. On passe sur le contexte compliqué pour seulement mentionner les solutions de droit adoptées.
La Cour relève d'abord, reprenant les termes de la cour d'appel, le fait que les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social, ce qui appelle traitement de la part de l'assemblée ; en effet, les pertes annuelles successives aboutissent à la perte des fonds propres (dont les apports constituant le capital social). L'un des maux actuels de la vie des affaires réside dans les sociétés sans capital ou ayant des capitaux propres faibles, ce qui souvent sollicite l'obligation de recapitalisation posée par le Code de commerce.
Toutefois, cette situation financière difficile (perte des capitaux propres) ne permet pas pas d'envisager, indique l'arrêt, une augmentation de capital où, en pratique, une partie des actionnaires ne peut pas souscrire au vu des délais très courts de souscription. La rapidité ne doit pas tourner à la précipitation, alors surtout qu'elle paraît écarter certains associés de l'opération de recapitalisation... Il y a alors le risque de voir l'assemblée générale qui est convoquée et tenue jugée irrégulière, notamment sur le pur concept de fraude (principe général juridique sans texte, mais parfaitement opératoire).
Dans le même attendu, la Cour relève, avec la cour d'appel qu'elle reprend, que les autres conditions prévues par l'augmentation de capital (qui exige des apports : précision pour les étudiants...) en cause, étaient frauduleuses ; en effet, l'opération pouvait se réaliser par compensation pour les associés majoritaires (la compensation permet un paiement et, de ce fait, elle permet de participer à un souscription de titres, souscription utile pour réaliser l'augmentation de capital). Que l'apport soit fait (payé) par compensation ou transfert de propriété de telle somme ou chose... peu importe... l'essentiel est ici que les modalités ouvertes augmentaient le traitement défavorable fait aux minoritaires.
Le dernier attendu condamne le mécanisme de prime d'émission qui caractérisait l'émission d'actions : elle était parfaitement injustifiée puisque la société était en mauvaise situation financière. La prime d'émission est la somme que les souscripteurs d'actions versent pour compenser les réserves de la société : cette somme permet d'instaurer une égalité entre anciens et nouveaux associés.
Naturellement, ces aspects techniques ont un sens général.
Lors de la recapitalisation, les minoritaires ont la possibilité de renforcer leurs positions et les associés majoritaires ne le savent que trop qui parfois ne peuvent pas souscrire car ils n'ont plus de fonds à "miser" dans l'entreprise, ce qui dilue leur seuil de participation.
La Cour relève d'abord, reprenant les termes de la cour d'appel, le fait que les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social, ce qui appelle traitement de la part de l'assemblée ; en effet, les pertes annuelles successives aboutissent à la perte des fonds propres (dont les apports constituant le capital social). L'un des maux actuels de la vie des affaires réside dans les sociétés sans capital ou ayant des capitaux propres faibles, ce qui souvent sollicite l'obligation de recapitalisation posée par le Code de commerce.
Toutefois, cette situation financière difficile (perte des capitaux propres) ne permet pas pas d'envisager, indique l'arrêt, une augmentation de capital où, en pratique, une partie des actionnaires ne peut pas souscrire au vu des délais très courts de souscription. La rapidité ne doit pas tourner à la précipitation, alors surtout qu'elle paraît écarter certains associés de l'opération de recapitalisation... Il y a alors le risque de voir l'assemblée générale qui est convoquée et tenue jugée irrégulière, notamment sur le pur concept de fraude (principe général juridique sans texte, mais parfaitement opératoire).
Dans le même attendu, la Cour relève, avec la cour d'appel qu'elle reprend, que les autres conditions prévues par l'augmentation de capital (qui exige des apports : précision pour les étudiants...) en cause, étaient frauduleuses ; en effet, l'opération pouvait se réaliser par compensation pour les associés majoritaires (la compensation permet un paiement et, de ce fait, elle permet de participer à un souscription de titres, souscription utile pour réaliser l'augmentation de capital). Que l'apport soit fait (payé) par compensation ou transfert de propriété de telle somme ou chose... peu importe... l'essentiel est ici que les modalités ouvertes augmentaient le traitement défavorable fait aux minoritaires.
Le dernier attendu condamne le mécanisme de prime d'émission qui caractérisait l'émission d'actions : elle était parfaitement injustifiée puisque la société était en mauvaise situation financière. La prime d'émission est la somme que les souscripteurs d'actions versent pour compenser les réserves de la société : cette somme permet d'instaurer une égalité entre anciens et nouveaux associés.
Naturellement, ces aspects techniques ont un sens général.
Lors de la recapitalisation, les minoritaires ont la possibilité de renforcer leurs positions et les associés majoritaires ne le savent que trop qui parfois ne peuvent pas souscrire car ils n'ont plus de fonds à "miser" dans l'entreprise, ce qui dilue leur seuil de participation.
Texte de LEGIFRANCE
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 16 avril 2013
N° de pourvoi: 09-10583 09-13651
Non publié au bulletin Rejet
M. Espel (président), président
Me Haas, SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° Q 09-10. 583 et n° Z 09-13. 651, qui attaquent le même arrêt ;
Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 novembre 2008), que suivant protocole d'accord du 21 novembre 2002, la société Dofirad BV, actionnaire de la société FS Holding, aujourd'hui dénommée Alliance Designers, a échangé avec les sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis et deux autres actionnaires des actions qu'elle détenait dans le capital de la société FS Holding contre des actions de la société FLG ; qu'à la suite de cette opération, le capital de la société FS Holding était réparti entre, d'un côté, les sociétés Cadanor et Dofirad BV à concurrence de 78, 78 %, de l'autre, les anciens actionnaires de la société FLG pour 21, 21 % ; que les capitaux propres de la société FS Holding étant devenus inférieurs à la moitié de son capital social, une assemblée générale extraordinaire de cette société a décidé, le 7 août 2003, une augmentation de capital assortie d'une prime d'émission et de la faculté pour les actionnaires d'exercer leur droit préférentiel de souscription ; que soutenant que cette délibération était intervenue en fraude de leurs droits d'actionnaires minoritaires, les sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis ont fait assigner les sociétés Cadanor, Dofirad BV et Alliance Designers en annulation de l'augmentation de capital et en paiement de dommages-intérêts ; qu'en cours d'instance, la société Alliance Designers a été mise en liquidation judiciaire, la société civile professionnelle BTSG étant nommée liquidateur ;
Attendu que le liquidateur de la société Alliance Designers, et les sociétés Cadanor et Dofirad BV font grief à l'arrêt d'avoir prononcé l'annulation de l'augmentation de capital et de tous les actes s'y rapportant et d'avoir condamné les deux dernières au paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité de procédure, alors, selon le moyen :
1°/ que seule la résolution d'une assemblée d'actionnaires prise contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment de membres de la minorité peut être annulée sur le fondement de la fraude aux droits des minoritaires ou de l'abus de majorité ; qu'en jugeant contraire à l'intérêt social de la société FS Holding, et pour cette raison constitutive d'une fraude aux droits des minoritaires, la décision d'augmentation du capital social de cette société décidée lors de l'assemblée générale extraordinaire du 7 août 2003, après avoir relevé qu'il « est exact que la décision des associés de ne pas dissoudre de manière anticipée la société alors que les capitaux propres de la société étaient inférieurs à la moitié du capital, prise par l'assemblée générale du 3 octobre 2002 de FS Holding (…), alors au surplus qu'il ressortait des comptes annuels de l'exercice clos le 31 janvier 2003 que les capitaux propres de la société étaient toujours inférieurs à la moitié du capital, obligeait la société à reconstituer ses fonds propres dans un délai de deux ans », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que la convocation de l'assemblée générale au mois d'août, pendant la période estivale, aurait rendu « nécessairement compliquée sinon impossible la souscription à l'augmentation de capital », tout en relevant que le délai de souscription à ladite augmentation, initialement fixé du 14 au 19 août 2003, avait ensuite été prolongé du 5 au 19 septembre suivants, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que les stipulations du pacte d'actionnaires les obligeant à notifier dans un délai de deux jours calendaires tout projet de transfert du droit de souscription ne les mettaient pas en mesure concrètement de céder ledit droit, sans tenir compte du fait que la reconduction du délai de souscription jusqu'au 19 septembre 2003 leur offrait deux jours calendaires supplémentaires à compter du 5 septembre 2003, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
4°/ qu'en tout état de cause, en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que les stipulations du pacte d'actionnaires les obligeant à notifier dans un délai de deux jours calendaires tout projet de transfert du droit de souscription ne les mettaient pas en mesure concrètement de céder ledit droit, et en caractérisant ainsi uniquement un supposé obstacle à la cession des droits de souscription tenant aux termes du protocole d'actionnaires et non pas à l'assemblée extraordinaire du 7 août 2003 dont l'annulation a été prononcée, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
5°/ qu'en jugeant que le second motif de l'augmentation de capital, consistant en la satisfaction d'un besoin de trésorerie, ne suffisait pas à justifier ladite augmentation parce que celle-ci s'étant effectuée par compensation avec une créance de la société Cadanor, il n'en était résulté aucun apport en trésorerie, sans répondre aux écritures des sociétés Alliance designers, Cadanor et Dofirad BV exposant que la créance ayant fait l'objet de la compensation résultait justement d'avances de trésorerie en compte courant réalisées antérieurement à l'augmentation de capital, dans l'attente de celle-ci, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ qu'en jugeant, pour contester la nécessité d'un apport en trésorerie et conclure à l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, qu'il n'est pas logique que le financement de la société FLG ait été effectué par la société FS Holding avant l'augmentation de capital, pour contester la validité de celle-ci, la cour d'appel, qui s'est prononcée au vu de l'opportunité d'opérations réalisées antérieurement à la décision annulée, a statué par un motif inopérant, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
7°/ qu'en jugeant qu'il « convient de s'interroger, comme le font les intimés (…) sur la réalité des avances faites par FS Holding à FLG », la cour d'appel qui a statué par un motif dubitatif a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
8°/ qu'en jugeant sans autre explication qu'« en tout état de cause, la manipulation avérée des comptes, les substitutions de sociétés créancières, les cessions de comptes courants que les appelants expliquent par les dispositions de l'article L. 511-7 3° du code monétaire et financier, introduisent dans l'opération incriminée une complexité inutile et une opacité qui ne peuvent que corroborer le grief de fraude articulé par les intimées », la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
9°/ que la prime d'émission permet de maintenir l'égalité entre actionnaires anciens ne participant pas à l'augmentation de capital et actionnaires anciens ou nouveaux y participant ; qu'en jugeant que la prime ne se justifierait pas dans son principe « puisque l'augmentation de capital est intervenue en vase clos entre personnes déjà toutes actionnaires », la cour d'appel a violé l'article L. 225-128 du code de commerce, ensemble l'article 1382 du code civil ;
10°/ que les sociétés Alliance Designers, Cadanor et Dofirad BV rappelaient dans leurs écritures que « le montant que les (sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis) auraient eu à décaisser si elles avaient souscrit à une augmentation de capital réalisée au pair, aurait été exactement le même que celui qu'elles auraient eu à décaisser dans le cadre d'une augmentation de capital avec prime d'émission, afin de maintenir leur niveau de participation, soit un montant de 1 451 636, 25 euros et non 2 700 000 euros », et qu'il était admis que le montant total de la souscription, comprenant la prime d'émission, était nécessaire à la reconstitution des fonds propres de la société ; qu'en jugeant qu'« une solution plus logique et plus équitable aurait été d'augmenter directement le capital social » pour juger que le montant de la prime d'émission confirmait l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, sans vérifier si ce montant n'était pas indifférent à l'éventuelle dilution de leur participation dans la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la décision des associés de ne pas dissoudre de manière anticipée la société Alliance designers obligeait cette dernière, dont les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social, à procéder dans un délai de deux ans à la reconstitution de ses fonds propres, l'arrêt retient que cette obligation légale ne pouvait justifier le caractère précipité de la décision d'augmenter le capital et la fixation des opérations de souscription en pleine période estivale ; qu'il retient encore que la convocation de l'assemblée générale extraordinaire au mois d'août et le bref délai de souscription, du 14 au 29 août 2003, même élargi du 5 au 19 septembre de la même année, rendaient nécessairement compliquée sinon impossible la souscription des minoritaires à l'augmentation de capital, ceux-ci ne disposant pas sur la société Alliance Designers, contrairement aux majoritaires, d'une créance leur permettant de procéder par voie de compensation ; que de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a pu déduire, abstraction faite du motif surabondant critiqué par les troisième et quatrième branches, que l'augmentation du capital, assortie de conditions telles qu'elles mettaient les actionnaires minoritaires dans l'impossibilité d'y souscrire, revêtait un caractère frauduleux ;
Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt relève que l'augmentation de capital a été libérée en totalité par compensation avec une créance détenue sur la société Alliance designers par son actionnaire majoritaire ; qu'ayant ainsi fait ressortir qu'il n'en était résulté aucune trésorerie pour cette société, la cour d'appel a, par ce seul motif rendant inopérante la critique de la cinquième branche, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les sixième, septième et huitième branches, exactement retenu que l'augmentation de capital ne pouvait être justifiée par un besoin de trésorerie de la société Alliance Designers ;
Et attendu, en troisième lieu, qu'ayant retenu que la prime d'émission n'était pas justifiée dans son principe puisqu'à l'époque où avait été décidée l'augmentation de capital, la société Alliance Designers connaissait d'importantes pertes d'exploitation et de substantielles pertes financières, la cour d'appel a pu en déduire, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les neuvième et dixième branches, que les conditions financières de l'augmentation de capital apparaissaient frauduleuses ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses troisième, quatrième, sixième, septième, huitième, neuvième et dixième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la SCP BTSG, en qualité de liquidateur de la société Alliance Designers, et les sociétés Cadanor et Dofirad BV aux dépens ;
Cour de cassation
chambre commerciale
Audience publique du mardi 16 avril 2013
N° de pourvoi: 09-10583 09-13651
Non publié au bulletin Rejet
M. Espel (président), président
Me Haas, SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° Q 09-10. 583 et n° Z 09-13. 651, qui attaquent le même arrêt ;
Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 25 novembre 2008), que suivant protocole d'accord du 21 novembre 2002, la société Dofirad BV, actionnaire de la société FS Holding, aujourd'hui dénommée Alliance Designers, a échangé avec les sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis et deux autres actionnaires des actions qu'elle détenait dans le capital de la société FS Holding contre des actions de la société FLG ; qu'à la suite de cette opération, le capital de la société FS Holding était réparti entre, d'un côté, les sociétés Cadanor et Dofirad BV à concurrence de 78, 78 %, de l'autre, les anciens actionnaires de la société FLG pour 21, 21 % ; que les capitaux propres de la société FS Holding étant devenus inférieurs à la moitié de son capital social, une assemblée générale extraordinaire de cette société a décidé, le 7 août 2003, une augmentation de capital assortie d'une prime d'émission et de la faculté pour les actionnaires d'exercer leur droit préférentiel de souscription ; que soutenant que cette délibération était intervenue en fraude de leurs droits d'actionnaires minoritaires, les sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis ont fait assigner les sociétés Cadanor, Dofirad BV et Alliance Designers en annulation de l'augmentation de capital et en paiement de dommages-intérêts ; qu'en cours d'instance, la société Alliance Designers a été mise en liquidation judiciaire, la société civile professionnelle BTSG étant nommée liquidateur ;
Attendu que le liquidateur de la société Alliance Designers, et les sociétés Cadanor et Dofirad BV font grief à l'arrêt d'avoir prononcé l'annulation de l'augmentation de capital et de tous les actes s'y rapportant et d'avoir condamné les deux dernières au paiement de dommages-intérêts et d'une indemnité de procédure, alors, selon le moyen :
1°/ que seule la résolution d'une assemblée d'actionnaires prise contrairement à l'intérêt social et dans l'unique dessein de favoriser des membres de la majorité au détriment de membres de la minorité peut être annulée sur le fondement de la fraude aux droits des minoritaires ou de l'abus de majorité ; qu'en jugeant contraire à l'intérêt social de la société FS Holding, et pour cette raison constitutive d'une fraude aux droits des minoritaires, la décision d'augmentation du capital social de cette société décidée lors de l'assemblée générale extraordinaire du 7 août 2003, après avoir relevé qu'il « est exact que la décision des associés de ne pas dissoudre de manière anticipée la société alors que les capitaux propres de la société étaient inférieurs à la moitié du capital, prise par l'assemblée générale du 3 octobre 2002 de FS Holding (…), alors au surplus qu'il ressortait des comptes annuels de l'exercice clos le 31 janvier 2003 que les capitaux propres de la société étaient toujours inférieurs à la moitié du capital, obligeait la société à reconstituer ses fonds propres dans un délai de deux ans », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que la convocation de l'assemblée générale au mois d'août, pendant la période estivale, aurait rendu « nécessairement compliquée sinon impossible la souscription à l'augmentation de capital », tout en relevant que le délai de souscription à ladite augmentation, initialement fixé du 14 au 19 août 2003, avait ensuite été prolongé du 5 au 19 septembre suivants, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382 du code civil ;
3°/ qu'en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que les stipulations du pacte d'actionnaires les obligeant à notifier dans un délai de deux jours calendaires tout projet de transfert du droit de souscription ne les mettaient pas en mesure concrètement de céder ledit droit, sans tenir compte du fait que la reconduction du délai de souscription jusqu'au 19 septembre 2003 leur offrait deux jours calendaires supplémentaires à compter du 5 septembre 2003, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
4°/ qu'en tout état de cause, en jugeant, pour retenir l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, que les stipulations du pacte d'actionnaires les obligeant à notifier dans un délai de deux jours calendaires tout projet de transfert du droit de souscription ne les mettaient pas en mesure concrètement de céder ledit droit, et en caractérisant ainsi uniquement un supposé obstacle à la cession des droits de souscription tenant aux termes du protocole d'actionnaires et non pas à l'assemblée extraordinaire du 7 août 2003 dont l'annulation a été prononcée, la cour d'appel a statué par un motif inopérant, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
5°/ qu'en jugeant que le second motif de l'augmentation de capital, consistant en la satisfaction d'un besoin de trésorerie, ne suffisait pas à justifier ladite augmentation parce que celle-ci s'étant effectuée par compensation avec une créance de la société Cadanor, il n'en était résulté aucun apport en trésorerie, sans répondre aux écritures des sociétés Alliance designers, Cadanor et Dofirad BV exposant que la créance ayant fait l'objet de la compensation résultait justement d'avances de trésorerie en compte courant réalisées antérieurement à l'augmentation de capital, dans l'attente de celle-ci, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°/ qu'en jugeant, pour contester la nécessité d'un apport en trésorerie et conclure à l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, qu'il n'est pas logique que le financement de la société FLG ait été effectué par la société FS Holding avant l'augmentation de capital, pour contester la validité de celle-ci, la cour d'appel, qui s'est prononcée au vu de l'opportunité d'opérations réalisées antérieurement à la décision annulée, a statué par un motif inopérant, violant ainsi l'article 1382 du code civil ;
7°/ qu'en jugeant qu'il « convient de s'interroger, comme le font les intimés (…) sur la réalité des avances faites par FS Holding à FLG », la cour d'appel qui a statué par un motif dubitatif a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
8°/ qu'en jugeant sans autre explication qu'« en tout état de cause, la manipulation avérée des comptes, les substitutions de sociétés créancières, les cessions de comptes courants que les appelants expliquent par les dispositions de l'article L. 511-7 3° du code monétaire et financier, introduisent dans l'opération incriminée une complexité inutile et une opacité qui ne peuvent que corroborer le grief de fraude articulé par les intimées », la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
9°/ que la prime d'émission permet de maintenir l'égalité entre actionnaires anciens ne participant pas à l'augmentation de capital et actionnaires anciens ou nouveaux y participant ; qu'en jugeant que la prime ne se justifierait pas dans son principe « puisque l'augmentation de capital est intervenue en vase clos entre personnes déjà toutes actionnaires », la cour d'appel a violé l'article L. 225-128 du code de commerce, ensemble l'article 1382 du code civil ;
10°/ que les sociétés Alliance Designers, Cadanor et Dofirad BV rappelaient dans leurs écritures que « le montant que les (sociétés Sozan Holding, Portugal Luxembourg et Financière Médicis) auraient eu à décaisser si elles avaient souscrit à une augmentation de capital réalisée au pair, aurait été exactement le même que celui qu'elles auraient eu à décaisser dans le cadre d'une augmentation de capital avec prime d'émission, afin de maintenir leur niveau de participation, soit un montant de 1 451 636, 25 euros et non 2 700 000 euros », et qu'il était admis que le montant total de la souscription, comprenant la prime d'émission, était nécessaire à la reconstitution des fonds propres de la société ; qu'en jugeant qu'« une solution plus logique et plus équitable aurait été d'augmenter directement le capital social » pour juger que le montant de la prime d'émission confirmait l'existence d'une fraude aux droits des minoritaires, sans vérifier si ce montant n'était pas indifférent à l'éventuelle dilution de leur participation dans la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la décision des associés de ne pas dissoudre de manière anticipée la société Alliance designers obligeait cette dernière, dont les capitaux propres étaient inférieurs à la moitié du capital social, à procéder dans un délai de deux ans à la reconstitution de ses fonds propres, l'arrêt retient que cette obligation légale ne pouvait justifier le caractère précipité de la décision d'augmenter le capital et la fixation des opérations de souscription en pleine période estivale ; qu'il retient encore que la convocation de l'assemblée générale extraordinaire au mois d'août et le bref délai de souscription, du 14 au 29 août 2003, même élargi du 5 au 19 septembre de la même année, rendaient nécessairement compliquée sinon impossible la souscription des minoritaires à l'augmentation de capital, ceux-ci ne disposant pas sur la société Alliance Designers, contrairement aux majoritaires, d'une créance leur permettant de procéder par voie de compensation ; que de ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel a pu déduire, abstraction faite du motif surabondant critiqué par les troisième et quatrième branches, que l'augmentation du capital, assortie de conditions telles qu'elles mettaient les actionnaires minoritaires dans l'impossibilité d'y souscrire, revêtait un caractère frauduleux ;
Attendu, en deuxième lieu, que l'arrêt relève que l'augmentation de capital a été libérée en totalité par compensation avec une créance détenue sur la société Alliance designers par son actionnaire majoritaire ; qu'ayant ainsi fait ressortir qu'il n'en était résulté aucune trésorerie pour cette société, la cour d'appel a, par ce seul motif rendant inopérante la critique de la cinquième branche, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les sixième, septième et huitième branches, exactement retenu que l'augmentation de capital ne pouvait être justifiée par un besoin de trésorerie de la société Alliance Designers ;
Et attendu, en troisième lieu, qu'ayant retenu que la prime d'émission n'était pas justifiée dans son principe puisqu'à l'époque où avait été décidée l'augmentation de capital, la société Alliance Designers connaissait d'importantes pertes d'exploitation et de substantielles pertes financières, la cour d'appel a pu en déduire, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les neuvième et dixième branches, que les conditions financières de l'augmentation de capital apparaissaient frauduleuses ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en ses troisième, quatrième, sixième, septième, huitième, neuvième et dixième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la SCP BTSG, en qualité de liquidateur de la société Alliance Designers, et les sociétés Cadanor et Dofirad BV aux dépens ;