Fonds BENEFIC : La Poste gagne en cassation. Les investisseurs sont déboutés. Parts de fonds communs de placement (FCP).

On a prévenu les investisseurs de passage sur ce site. Gagner un procès en "responsabilité boursière" est difficile. La Chambre commerciale vient de casser 5 jugements qui tous condamnaient La Poste. Certaines cassations sont prononcées pour violation de la loi. La violation de l'article 1147 du Code civil s'explique (il faudrait voir si, s'agissant de activités financières de La Poste, quelques textes "boursiers" ne pouvaient jouer... outre le droit civil...). Surtout, la cassation signifie probablement que... la messe est dite.



Il s'agissait de parts de FCFP avec garantie partielle

Les titres achetés étaient des parts de fonds commun de placement (FCP) avec une garantie partielle sur la chute d'un indice. Les juges du premier degré, un peu sans doute comme les petits investisseurs, avaient dû trouver la présentation compliquée. Elle ne l'était pas vraiment (à lire la chambre commerciale), sauf à ne pas comprendre ce qu'est un titre (une "valeur boursière", ce qu'est un indice (boursier) ou ce qu'est une garantie partielle.

La Haute juridiction constate que les jugements n'indiquent pas en quoi la présentation, faite par les documents contractuels de La Poste, était erronée ou trompeuse. Le défaut de caractérisation de la faute implique la cassation ; l'affaire peut aussi être considérée comme mettant en lumière les insuffisances des juges de proximité (trois juridictions de ce type étaient en cause). Sous l'aspect civil (on sait qu'il y a par ailleurs du contentieux pénal engagé sur le fondement du délit de publicité trompeuse), comme 5 arrêts sont en cause, on imagine que la Cour avait en main tous les documents contractuels que La Poste avait émis (pour le compte du FCP). Ce point factuel importe car il fait, en pratique, de ces décisions, une position de principe (voyez infra le nota).

Cela signifie que la Haute Juridiction ne laissera pas condamner La Poste, sur ce sujet, dans d'autres affaire. Sa jurisprudence est arrêtée.

Outre ma promesse de conclure quelques réflexions sur, d'une part, la responsabilité boursière et, d'autre part, sur la responsabilité bancaire, on tire immédiatement, de ces arrêts une conclusion d'espèce simple mais importante. Le défaut de faute de La Poste a été constaté en pleine connaissance de cause. En conséquence, pour les clients de La Poste, la voie d'une réparation sur le fondement du contrat sera difficile... la messe est probablement dite.

Ajout au 30 08 2007. La messe était effectivement dite. La Cour de cassation considère bel et bien que sa doctrine (ou jurisprudence) est fixée sur cette affaire.

Un arrêt du 15 mai 2007 n'est pas publié au Bulletin de la Cour car la Chambre commerciale considère qu'il n'apporte rien par rapport aux 5 arrêts de septembre 2006.

Cela confirme l'analyse ci-dessus faite il y a plusieurs mois. On notera, à propos de cet arrêt, le fondement légal tiré du code de la consommation qui nous semble plus que superfétatoire, embrouillé. Certains auteurs, il est vrai, acceptent de mélanger droit de la consommation et droit boursier, ce n'est ni utile ni logique depuis que l'investisseur dispose d'un véritable statut dans le code monétaire et financier


Voilà ce dernier arrêt (texte tiré de la base publique Legifrance) :

Cour de Cassation, Chambre commerciale, Audience publique du 15 mai 2007, Rejet
N° de pourvoi : 05-21545, Inédit

Président : M. TRICOT
REPUBLIQUE FRANCAISE, AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS, LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 septembre 2005), que Mme X... a souscrit auprès de La Poste, aux droits de laquelle vient la Banque postale, des parts d'un fonds commun de placement dénommé Bénéfic ; que la valeur de ces parts s'étant, à l'échéance, trouvée inférieure à la valeur de souscription, Mme X..., reprochant à La Poste d'avoir manqué à ses obligations d'information et de conseil, a demandé que celle-ci soit condamnée à lui payer des dommages-intérêts ;

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette demande alors, selon le moyen :

1 / que l'obligation d'information du banquier, prestataire de services d'investissement, sur les placements financiers qu'il propose à ses clients, doit être personnelle et adaptée aux compétences et connaissances de ces derniers et ne saurait, partant, se réduire à la remise de la notice d'information afférente au produit délivrée par la COB ;

qu'en déboutant ainsi Mme X... de ses demandes indemnitaires à l'encontre de La Poste pour ne pas l'avoir informée des risques de perdre son capital investi au motif inopérant que cette dernière avait déclaré "avoir reçu la notice d'information relative à l'OPCVM dont (elle) venait d'acquérir les parts" et qu'une telle notice faisait état du risque de perte en capital du placement "à concurrence du pourcentage de la baisse de l'Euro 50 supérieure à 23 %", quand la remise d'une telle notice, explicitant les éléments essentiels du placement en des termes techniques, incompréhensible pour un épargnant peu avisé, n'était pas de nature à libérer l'établissement financier de son obligation d'information à son égard, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 du code de la consommation, 3-3-5 du règlement général du CMF, applicable en la cause, L. 533-4 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147 du code civil ;

2 / que l'obligation d'information du banquier, prestataire de services d'investissement, sur les placements financiers qu'il propose à ses clients, doit être préalable à la souscription du produit financier proposé ; qu'en déboutant ainsi Mme X... de ses demandes indemnitaires à l'encontre de La Poste pour ne pas l'avoir informée des risques de perdre son capital investi au motif inopérant que "la lettre de "bienvenue" adressée le 17 avril par La Poste à Mme X..., rappelait que "'jusqu'à une baisse de 23 % (de l'Euro 50), votre capital net investi reste protégé", quand une telle lettre, qui ne mettait d'ailleurs nullement en garde Mme X... sur les risques liés au placement proposé adressée postérieurement à la souscription des parts litigieuses, et ne pouvait donc être de nature à libérer La Poste de son obligation précontractuelle d'information, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 du code de la consommation, 3-3-5 du règlement général du CMF, applicable en la cause, L. 533-4 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147 du code civil ;

3 / que l'obligation d'information du banquier, prestataire de services d'investissement, sur les placements financiers qu'il propose à ses clients, s'étend à la mise en garde des épargnants sur les risques de retournement brutal de la conjoncture boursière, serait-il exceptionnel et imprévisible ; qu'en déboutant ainsi Mme X... de ses demandes indemnitaires à l'encontre de La Poste au motif inopérant que "tout investisseur, fût-il dépourvu de compétence particulière en matière boursière, ne peut ignorer l'aléa et le risque de perte inhérent à ce type d'opération, et que l'importance exceptionnelle de la baisse des cours des valeurs mobilières et de l'ensemble des marchés financiers survenue entre mars 2000 et mars 2003 ne pouvait être anticipée par tout professionnel normalement avisé de l'investissement en fonds commun de placement", quand il appartenait à La Poste de la mettre en garde sur les risques d'un retournement brutal de la conjoncture boursière, peu important, à cet égard, l'imprévisibilité de tels risques et la conscience putative ou supposée de Mme X... sur ce danger, la cour d'appel a violé les articles L. 111-1 du code de la consommation, 3-3-5 du règlement général du CMF, applicable en la cause, L. 533-4 du code monétaire et financier, ensemble l'article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir relevé que la notice d'information remise à Mme X... précisait qu'il s'agissait d'un placement boursier nécessairement soumis aux aléas du marché et que le capital n'était garanti que jusqu'à 23 % de baisse de l'indice Euro 50, l'arrêt retient que le risque de perte en capital, à concurrence de la baisse de l'Euro 50 supérieure à 23 %, y était donc bien explicitement mentionné ;

qu'en l'état de ces seules constatations et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième et troisième branches, la cour d'appel a décidé à bon droit que La Poste n'avait pas manqué à son obligation d'information ; que le moyen, non fondé en sa première branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;...

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