Les universitaires sont appelés à changer leurs méthodes, leurs façons et leurs outils (sur ce dernier point, il faudrait leur en fournir...). Les ministères le disent, les dirigeants de l'université aussi et certains collègues le reprennent (surtout quand ils sont allés à l'étranger). D'autres, carrément, théorisent, ils en font une spécialité - c'est leur liberté, vive la recherche. Ils sont ainsi amenés à expliquer à l'ensemble de leurs collègues comment ils doivent enseigner.
Ils invoquent la pédagogie !
Il n'est pas certain que ces spécialistes soient toujours des épistémologues de premier plan, des chercheurs en matière d'histoire des sciences ou, encore, des philosophes de la connaissance; En un tour de main éclipsent-ils le tout ? Il faudrait voir, mais en tout cas voilà la pédagogie.
Vient-elle du collège et du lycée où elle a fait des merveilles...?
Or, et en effet, un véritable enseignant chercheur doit mélanger ces trois plans avec le lot de connaissances qu'il a à transmettre. D'une année sur l'autre, le cours peut changer du fait des recherches de l'enseignant. Le cours subit les recherches, c'est pour cela que l'on est "enseignant-chercheur". Le juriste est assailli comme le physicien par l'accroissement des connaissances et données : cent lois par an, et cent textes européens, et cent décisions de justice importantes (vive l'IA en droit !). Tout change en permanence.
Je prends un exemple simple : nombre des thèmes que j'enseigne aujourd'hui exigent quelques mots sur la blockchain ou l'intelligence artificielle, je complète mes propos (antérieurs) sur les systèmes. J'aimerais bien savoir ce qu'un spécialiste de la pédagogie peut m'apprendre sur ces sujets qui sont en formation avec des publications qui, trois fois sur quatre, sont du journalisme de mauvaise qualité.
Ce jeu là, qui fait passer de la recherche au cours (certes de 4e ou 5e année universitaire), la pédagogie n'en dit pas grand chose je crois. Or c'est la pierre sur laquelle l'Université est bâtie. La pierre des Docteurs (que certains prennent sans vergogne et assez régulièrement pour des imbéciles, mais ils jugent mais n'écrivent pas...). La pédagogie ignore ce point, une chance en un sens.
Ouf !
Nonobstant cette situation, voilà, certains collègues nous disent comment nous devons enseigner. C'est le vent du moment, et ce depuis quelques années.
On reviendra sur certains de ces aspects, liés à la recherche, mais on a progressé. La pédagogie, on l'a compris, vise les masses d'étudiants que l'on constitue en ignorants, fainéants et intellectuellement peu performants.
On peut suspecter les tenants de la pédagogie, sous couvert d'un changement fondamental du Supérieur, d'objectifs politiques : faire plaisir aux ministres ou autres dirigeants qui entendent que les étudiants ne se plaignent pas de leur formation. Que tout soit calme, que tout étudiant ait un diplôme, que le consensus règne et le monde sera meilleur. Vraiment ?
Il faut des cours simples. Les cours simples vont aux questions simples, au-delà, ça se discute.
Il faut des supports. Les pédagogistes n'ont manifestement pas tous écrit dans leur matière. Mes supports ? Mes publications ! Accessibles en ligne pour un grand nombre car les BU sont abonnées.
Les pédagogistes préconisent-ils le blog...? Pas certain, ça les obligerait à en tenir un ! Vive le monde d'hier ! Là, la majorité du Supérieur sera d'accord - d'où le grand silence de tous sur les blogs...
On mélange aussi les exigences.
Il faut des supports simples et clairs. Oui mais alors, quelle partie des mes connaissances et recherches dois-je passer à la poubelle ? Le pédagogue ne peut plus répondre : c'est que sa mission suppose un champ de connaissances déterminée et fixe. Certains éditeurs gagnent de l'argent avec cette conception. Ces ouvrages cours et didactiques encourent souvent la critique.
Il faut des cours interactifs. Là, je suis stupéfait. J'ai eu de trop bon maîtres... la question était en général autorisée. Soit au bon moment dans le cours, soit en fin de cours. Soit en début de cours sur le cours précédent. On connaît le résultat du cours ouvert : souvent maigre. Certains en profitent pour faire des cours fermés voire dictatoriaux (la discipline est à la mode) et le premier qui tombe sa règle en métal sort...!
Il faut des cours inversés. L'étudiant lit avant une section, un chapitre... un document... Ah chouchouter l'étudiant avec des documents, le materner... quand la vie est si dure au dehors ?! J'en reviens à la situation de l'enseignant-chercheur qui, conformément à sa mission, publie.
En premier lieu, je suis étonné quand, pour tout cours il y a des ouvrages de divers collègues (pour ma part, je produis 900 pages qui se découpent sur en 5 ou 12 pages par thème, par exemple le chèque ; l'ouvrage vaut 3 ou 4 cours). Si les étudiants ne vont pas en BU, s'ils ne lisent pas, s'ils ne regardent pas la documentation (alors qu'il existe souvent 3 livres par matière...)... la pédagogie peut-elle prendre le relais ? La réponse est non. L'étudiant est majeur et vacciné et l'on doit le respecter, en adulte qu'il est, en l'invitant à apprendre à se débrouiller. Le Supérieur doit apprendre cela, et souvent avec pédagogie (les professeurs et bibliothécaires expliquent comment se documenter). Là où il y a un défaut, c'est sur le financement des études : Etat, étudiants et parents oublient le budget livre. Travailler, étudier sans livre...?
En second lieu, les cours inversés sont souvent décevants. La raison en est simple, c'est que les étudiants ne jouent pas le jeu. Ils ne lisent pas avant. Le professeur pilier est, dans le subconscient de chacun, préféré au professeur tuteur (guide durant le cours inversé). L'étudiant attend que le professeur donne "la chose", le cours, la matière. Alors, certes, on peut transformer le professeur en acteur (ce qu'il est...) et mettre en ligne des vidéos sur le cours. Les étudiants auront cours en dehors de l'Université... est-ce souhaitable ? A voir... une université.4, sans aucune administration.
Le cours magistral est inadapté... c'est l'un des angles d'attaque préféré des tenants de la pédagogie. Il est vrai que nombre de cours ne sont guère magistraux. Mais le mauvais cours magistral n'est pas celui à considérer. Tel le cours qui tourne à la lecture, que les étudiants adorent (la lecture d'un ouvrage, fût-il excellent, est une pratique qui n'aurait pas dû être acceptée, ce n'est pas un problème de pédagogie, je ne vais pas plus loin).
Les recrutements servent à déterminer la capacité des docteurs, qui enseigneront, à notamment animer un cours magistral. Il va sans dire que "animer" ne veut pas dire afficher des slides de toutes les couleurs mais dont une phrase sur trois est - fondamentalement - contestable...
Tout ceci ne consiste pas à s'écrier "Vive le cours obscur !?" (un jour un collègue m'a demandé des documents plus obscurs car mon projet de recherche se lisait trop bien, obscur fait parfois "intelligent").
Parfois, mais c'est rare, le cours peut être obscur : les connaissances sont embrouillées, les idées en désordre, les livres superficiels ratent les problèmes, les faux problèmes glougloutent de partout y compris dans "les bonnes revues"... Il faut simplement le dire. Le cours se limitera à quelques considérations, à des éléments...
Comment enseigner la fraude à la carte bancaire quand, pour certains, la jurisprudence a changé 3 fois en 18 mois ? Appliquant des textes faussement clairs et précis... Et que d'autres relient les solutions actuelles à des arrêts d'un autre siècle, d'un autre Droit, d'un autre contexte technologique... Le cours peut être obscur quand on est en train de créer une matière, de fabriquer la connaissance. C'est rare et il faut le dire à l'auditoire.
Dans le cours obscur l'étudiant très intelligent entrevoit la connaissance : le cours obscur, trop pointu, trop approfondi peut laisser deviner la recherche, mieux, la découverte : le cours complexe peut donner la vocation de la recherche à l'esprit brillant. Je me demande si les évaluations comportent ce paradoxe, enfin non, je ne me demande pas.
Sinon, le cours peut être clair : le devoir d'explication n'est pas le devoir de mise en garde, voilà qui est clair - quoique certains ne mettent pas le doigt sur la différence pertinente parmi les quatre apparentes (c'est une image).
Le cours doit être clair. Au dos du professeur il est un tableau. Le schéma est un bon procédé (même si une flèche entre un rond et un triangle ne vaut pas une phrase qui est le fruit de 2 500 ans de fabrication d'une langue précise). J'ai parfois été injuste avec le schéma que j'ai, en réalité, toujours pratiqué. Le schéma est un complément. Schématique...
On invite donc à de la pédagogie. Pour y pousser, on a instauré l'évaluation des enseignements, et sans nuance. Les étudiants qui ne font rien, qui n'avaient pas les bases..., qui ont été absents, qui ont eu les pires notes peuvent critiquer un enseignement - en vérité un enseignant.
C'est une honte. Un faute grave de l'institution universitaire. Le justiciable doit-il noter les juges ? J'aimerais voir le résultat.
Or l'enseignant est un juge et quand il tranche sérieusement, il a tout lieu de subir. Le cours bien noté c'est le cours facile, l'enseignant qui donne des sujets faciles et qui note largement (allez, tout le monde à 40 / 60 ; c'est le succès assuré). Je voudrais voir le même cours et enseignant évalués avec, dans un cas, une notation serrée (à 8 de moyenne), et dans l'autre lâche (à 13 de moyenne). Les universités qui font de l'évaluation font-elles ces tests - et d'autres - ou font-elles du bricolage pour faire des rapports rassurants au ministère ?
La pédagogie pousse à une démagogie effrayante. Au frais du contribuable puisque le système ne sert alors presque plus à rien... Elle évite tout discours franc aux étudiants. Voilà de quoi la pédagogie est le nom.
Ce qui serait intéressant c'est de donner la parole aux étudiants sérieux qui sont dans une fourchette de 8 à 12 et à travers une interrogation qui purge les réponses qui sont contradictoires, inconciliables. Les autres avis peuvent compter, mais ceux qui sont perdus ont besoin de secours importants, et ceux qui comprennent tout très vite et lisent beaucoup ont besoin de conseils pointus de lecture... Un pédagogie adaptée, variable : quel professeur ne répond pas honnêtement, par des conseils adaptés, à un étudiant qui l'interroge ?
La pédagogie est un bon alibi pour ne pas appeler les étudiants au travail. Il est vrai que ce n'est guère facile tant le chômage galope...
En somme, la pédagogie est, selon nous, le nom de la lâcheté qui réduit tout le monde au silence quand il faut appeler les étudiants à travailler dur, sérieusement, régulièrement en apprenant à diversifier leurs sources et méthodes. Il faut appeler les étudiants à s'impliquer car les études supérieures sont, en vérité, une sorte d'expérience professionnelle.
Mais personne ne veut parler courageusement aux étudiants - lesquels ne savent pas lire une équipe pédagogique, ni un CV de prof, ni la cohérence d'un diplôme : on s'en remet aux parfois ubuesques classements de la presse.
Dans ces circonstances, la pédagogie ne servira à rien, sinon qu'à baisser le niveau du Supérieur et à faire fuir les chercheurs. Dans 30 ans on se demandera pourquoi la recherche universitaire est en panne et que la connaissance se vend si cher sur le marché... les mêmes, qui facilitent aujourd'hui la démagogie, crieront au scandale de la "marchéisation" des connaissances !
Rendez-vous dans 30 ans.
Les diplômes privés l'emporteront aisément parce que les universitaires, à force d'abaisser leur niveau, auront été rejoints par des enseignants qui ne sont pas chercheurs... Il y a des institutions qui ont bien fonctionné sur ce mode. Quand leurs recettes ne valent plus, elles disparaissent, englouties dans des murs trop beaux, des connaissances standardisées et pasteurisées, des slides creux, des interventions professionnalisées à l'excès, des tests ou QCM privés de sens, du contrôle continue qui tue le contrôle en continu, le tout en l'absence de toute recherche, de toute interrogation et couronné par d'uniformes considérations de... pédagogie !
L'Université qui cherche, elle, a mille ans. Même si elle ne trouve pas facilement, et qu'elle est étouffée par cent considérations administratives. L'Université peut s'adapter mais doit cesser de s'abaisser sous le joug de quelques besoins politiques et d'une bien-pensance qui n'est ni bien ni pensée.
Ils invoquent la pédagogie !
Il n'est pas certain que ces spécialistes soient toujours des épistémologues de premier plan, des chercheurs en matière d'histoire des sciences ou, encore, des philosophes de la connaissance; En un tour de main éclipsent-ils le tout ? Il faudrait voir, mais en tout cas voilà la pédagogie.
Vient-elle du collège et du lycée où elle a fait des merveilles...?
Or, et en effet, un véritable enseignant chercheur doit mélanger ces trois plans avec le lot de connaissances qu'il a à transmettre. D'une année sur l'autre, le cours peut changer du fait des recherches de l'enseignant. Le cours subit les recherches, c'est pour cela que l'on est "enseignant-chercheur". Le juriste est assailli comme le physicien par l'accroissement des connaissances et données : cent lois par an, et cent textes européens, et cent décisions de justice importantes (vive l'IA en droit !). Tout change en permanence.
Je prends un exemple simple : nombre des thèmes que j'enseigne aujourd'hui exigent quelques mots sur la blockchain ou l'intelligence artificielle, je complète mes propos (antérieurs) sur les systèmes. J'aimerais bien savoir ce qu'un spécialiste de la pédagogie peut m'apprendre sur ces sujets qui sont en formation avec des publications qui, trois fois sur quatre, sont du journalisme de mauvaise qualité.
Ce jeu là, qui fait passer de la recherche au cours (certes de 4e ou 5e année universitaire), la pédagogie n'en dit pas grand chose je crois. Or c'est la pierre sur laquelle l'Université est bâtie. La pierre des Docteurs (que certains prennent sans vergogne et assez régulièrement pour des imbéciles, mais ils jugent mais n'écrivent pas...). La pédagogie ignore ce point, une chance en un sens.
Ouf !
Nonobstant cette situation, voilà, certains collègues nous disent comment nous devons enseigner. C'est le vent du moment, et ce depuis quelques années.
On reviendra sur certains de ces aspects, liés à la recherche, mais on a progressé. La pédagogie, on l'a compris, vise les masses d'étudiants que l'on constitue en ignorants, fainéants et intellectuellement peu performants.
On peut suspecter les tenants de la pédagogie, sous couvert d'un changement fondamental du Supérieur, d'objectifs politiques : faire plaisir aux ministres ou autres dirigeants qui entendent que les étudiants ne se plaignent pas de leur formation. Que tout soit calme, que tout étudiant ait un diplôme, que le consensus règne et le monde sera meilleur. Vraiment ?
Il faut des cours simples. Les cours simples vont aux questions simples, au-delà, ça se discute.
Il faut des supports. Les pédagogistes n'ont manifestement pas tous écrit dans leur matière. Mes supports ? Mes publications ! Accessibles en ligne pour un grand nombre car les BU sont abonnées.
Les pédagogistes préconisent-ils le blog...? Pas certain, ça les obligerait à en tenir un ! Vive le monde d'hier ! Là, la majorité du Supérieur sera d'accord - d'où le grand silence de tous sur les blogs...
On mélange aussi les exigences.
Il faut des supports simples et clairs. Oui mais alors, quelle partie des mes connaissances et recherches dois-je passer à la poubelle ? Le pédagogue ne peut plus répondre : c'est que sa mission suppose un champ de connaissances déterminée et fixe. Certains éditeurs gagnent de l'argent avec cette conception. Ces ouvrages cours et didactiques encourent souvent la critique.
Il faut des cours interactifs. Là, je suis stupéfait. J'ai eu de trop bon maîtres... la question était en général autorisée. Soit au bon moment dans le cours, soit en fin de cours. Soit en début de cours sur le cours précédent. On connaît le résultat du cours ouvert : souvent maigre. Certains en profitent pour faire des cours fermés voire dictatoriaux (la discipline est à la mode) et le premier qui tombe sa règle en métal sort...!
Il faut des cours inversés. L'étudiant lit avant une section, un chapitre... un document... Ah chouchouter l'étudiant avec des documents, le materner... quand la vie est si dure au dehors ?! J'en reviens à la situation de l'enseignant-chercheur qui, conformément à sa mission, publie.
En premier lieu, je suis étonné quand, pour tout cours il y a des ouvrages de divers collègues (pour ma part, je produis 900 pages qui se découpent sur en 5 ou 12 pages par thème, par exemple le chèque ; l'ouvrage vaut 3 ou 4 cours). Si les étudiants ne vont pas en BU, s'ils ne lisent pas, s'ils ne regardent pas la documentation (alors qu'il existe souvent 3 livres par matière...)... la pédagogie peut-elle prendre le relais ? La réponse est non. L'étudiant est majeur et vacciné et l'on doit le respecter, en adulte qu'il est, en l'invitant à apprendre à se débrouiller. Le Supérieur doit apprendre cela, et souvent avec pédagogie (les professeurs et bibliothécaires expliquent comment se documenter). Là où il y a un défaut, c'est sur le financement des études : Etat, étudiants et parents oublient le budget livre. Travailler, étudier sans livre...?
En second lieu, les cours inversés sont souvent décevants. La raison en est simple, c'est que les étudiants ne jouent pas le jeu. Ils ne lisent pas avant. Le professeur pilier est, dans le subconscient de chacun, préféré au professeur tuteur (guide durant le cours inversé). L'étudiant attend que le professeur donne "la chose", le cours, la matière. Alors, certes, on peut transformer le professeur en acteur (ce qu'il est...) et mettre en ligne des vidéos sur le cours. Les étudiants auront cours en dehors de l'Université... est-ce souhaitable ? A voir... une université.4, sans aucune administration.
Le cours magistral est inadapté... c'est l'un des angles d'attaque préféré des tenants de la pédagogie. Il est vrai que nombre de cours ne sont guère magistraux. Mais le mauvais cours magistral n'est pas celui à considérer. Tel le cours qui tourne à la lecture, que les étudiants adorent (la lecture d'un ouvrage, fût-il excellent, est une pratique qui n'aurait pas dû être acceptée, ce n'est pas un problème de pédagogie, je ne vais pas plus loin).
Les recrutements servent à déterminer la capacité des docteurs, qui enseigneront, à notamment animer un cours magistral. Il va sans dire que "animer" ne veut pas dire afficher des slides de toutes les couleurs mais dont une phrase sur trois est - fondamentalement - contestable...
Tout ceci ne consiste pas à s'écrier "Vive le cours obscur !?" (un jour un collègue m'a demandé des documents plus obscurs car mon projet de recherche se lisait trop bien, obscur fait parfois "intelligent").
Parfois, mais c'est rare, le cours peut être obscur : les connaissances sont embrouillées, les idées en désordre, les livres superficiels ratent les problèmes, les faux problèmes glougloutent de partout y compris dans "les bonnes revues"... Il faut simplement le dire. Le cours se limitera à quelques considérations, à des éléments...
Comment enseigner la fraude à la carte bancaire quand, pour certains, la jurisprudence a changé 3 fois en 18 mois ? Appliquant des textes faussement clairs et précis... Et que d'autres relient les solutions actuelles à des arrêts d'un autre siècle, d'un autre Droit, d'un autre contexte technologique... Le cours peut être obscur quand on est en train de créer une matière, de fabriquer la connaissance. C'est rare et il faut le dire à l'auditoire.
Dans le cours obscur l'étudiant très intelligent entrevoit la connaissance : le cours obscur, trop pointu, trop approfondi peut laisser deviner la recherche, mieux, la découverte : le cours complexe peut donner la vocation de la recherche à l'esprit brillant. Je me demande si les évaluations comportent ce paradoxe, enfin non, je ne me demande pas.
Sinon, le cours peut être clair : le devoir d'explication n'est pas le devoir de mise en garde, voilà qui est clair - quoique certains ne mettent pas le doigt sur la différence pertinente parmi les quatre apparentes (c'est une image).
Le cours doit être clair. Au dos du professeur il est un tableau. Le schéma est un bon procédé (même si une flèche entre un rond et un triangle ne vaut pas une phrase qui est le fruit de 2 500 ans de fabrication d'une langue précise). J'ai parfois été injuste avec le schéma que j'ai, en réalité, toujours pratiqué. Le schéma est un complément. Schématique...
On invite donc à de la pédagogie. Pour y pousser, on a instauré l'évaluation des enseignements, et sans nuance. Les étudiants qui ne font rien, qui n'avaient pas les bases..., qui ont été absents, qui ont eu les pires notes peuvent critiquer un enseignement - en vérité un enseignant.
C'est une honte. Un faute grave de l'institution universitaire. Le justiciable doit-il noter les juges ? J'aimerais voir le résultat.
Or l'enseignant est un juge et quand il tranche sérieusement, il a tout lieu de subir. Le cours bien noté c'est le cours facile, l'enseignant qui donne des sujets faciles et qui note largement (allez, tout le monde à 40 / 60 ; c'est le succès assuré). Je voudrais voir le même cours et enseignant évalués avec, dans un cas, une notation serrée (à 8 de moyenne), et dans l'autre lâche (à 13 de moyenne). Les universités qui font de l'évaluation font-elles ces tests - et d'autres - ou font-elles du bricolage pour faire des rapports rassurants au ministère ?
La pédagogie pousse à une démagogie effrayante. Au frais du contribuable puisque le système ne sert alors presque plus à rien... Elle évite tout discours franc aux étudiants. Voilà de quoi la pédagogie est le nom.
Ce qui serait intéressant c'est de donner la parole aux étudiants sérieux qui sont dans une fourchette de 8 à 12 et à travers une interrogation qui purge les réponses qui sont contradictoires, inconciliables. Les autres avis peuvent compter, mais ceux qui sont perdus ont besoin de secours importants, et ceux qui comprennent tout très vite et lisent beaucoup ont besoin de conseils pointus de lecture... Un pédagogie adaptée, variable : quel professeur ne répond pas honnêtement, par des conseils adaptés, à un étudiant qui l'interroge ?
La pédagogie est un bon alibi pour ne pas appeler les étudiants au travail. Il est vrai que ce n'est guère facile tant le chômage galope...
En somme, la pédagogie est, selon nous, le nom de la lâcheté qui réduit tout le monde au silence quand il faut appeler les étudiants à travailler dur, sérieusement, régulièrement en apprenant à diversifier leurs sources et méthodes. Il faut appeler les étudiants à s'impliquer car les études supérieures sont, en vérité, une sorte d'expérience professionnelle.
Mais personne ne veut parler courageusement aux étudiants - lesquels ne savent pas lire une équipe pédagogique, ni un CV de prof, ni la cohérence d'un diplôme : on s'en remet aux parfois ubuesques classements de la presse.
Dans ces circonstances, la pédagogie ne servira à rien, sinon qu'à baisser le niveau du Supérieur et à faire fuir les chercheurs. Dans 30 ans on se demandera pourquoi la recherche universitaire est en panne et que la connaissance se vend si cher sur le marché... les mêmes, qui facilitent aujourd'hui la démagogie, crieront au scandale de la "marchéisation" des connaissances !
Rendez-vous dans 30 ans.
Les diplômes privés l'emporteront aisément parce que les universitaires, à force d'abaisser leur niveau, auront été rejoints par des enseignants qui ne sont pas chercheurs... Il y a des institutions qui ont bien fonctionné sur ce mode. Quand leurs recettes ne valent plus, elles disparaissent, englouties dans des murs trop beaux, des connaissances standardisées et pasteurisées, des slides creux, des interventions professionnalisées à l'excès, des tests ou QCM privés de sens, du contrôle continue qui tue le contrôle en continu, le tout en l'absence de toute recherche, de toute interrogation et couronné par d'uniformes considérations de... pédagogie !
L'Université qui cherche, elle, a mille ans. Même si elle ne trouve pas facilement, et qu'elle est étouffée par cent considérations administratives. L'Université peut s'adapter mais doit cesser de s'abaisser sous le joug de quelques besoins politiques et d'une bien-pensance qui n'est ni bien ni pensée.