DSK ou l'immuable parabole de l'homme accusé. La barbarie du système judiciaire reposant sur la preuve par témoignage et l'intime conviction du juge. Une affaire en cours est... en cours, circulez il n'y a rien à dire !



Quel que soit le système judiciaire, l'accusation peut se tromper et l'accusation n'est pas la Justice. La présomption d'innocence est faite pour endiguer l'erreur populaire et journalistique qui sans nuance donne tout les raisons à l'accusation et qui la confond avec la Justice. Il n'y a donc pas cinquante choses à dire dans cette affaire après que l'accusation, le bureau du Procureur, reconnaisse aujourd'hui que l'accusatrice n'est pas fiable. A la mesure des accusation qui ont été portées, la perspective de réhabilitation est aujourd'hui nettement porté.

Ici, la "justice médiatique" fonctionne (si on peut dire) : l'événement est récent et le monde entier s'apprête à donner toute sa compassion à DSK et à sa famille - mais on sait que lorsqu'une affaire se retourne après des mois ou des années, les accusés n'ont aucunement droit à cette "justice médiatique". Les journalistes ne font pas leurs "Unes" sur les acquittements et les douleurs des victimes judiciaires : ils n'enquêtent pas sur les auteurs de ces injustices qui fabriquent des "victime" du système".

En l'espèce, les dégâts sont considérables parce que cette affaire a fait perdre à DSK d'éminentes fonctions au FMI et, peut-être, la possibilité de concourir "normalement" pour la présidentielle. La perte d'un emploi est une chose qui arrive aussi à ceux qui sont incarcérés. La perte présidentielle c'est autre chose.

Il n'y a sauf cela, et malheureusement, que choses habituelles sinon normales : dans de très nombreux systèmes juridiques la parole de la victime fait foi et la désignation du coupable fait justice ! Pour lutter contre cela, il faut dévaloriser le témoignage des victimes (mais quel législateur osera le faire ?!) et privilégier dans la la procédure pénale la preuve positive et matérielle.

A propose de ce type de preuve, sachons le distinguer des simples examens scientifiques. Notons que du sperme sur un habit ou de la moquette prouve seulement qu'il y est... arrivé ! L'analyse ADN prouvant l'identité de celui qui l'a émis, pas plus. Bref une analyse d'ADN ne prouve rien en soi ! Un seul journaliste l'aura-t-il dit ici ? Du sperme prouve seulement qu'il y a eu une activité sexuelle (encore que...). Les examens de police scientifique ne sont donc pas systématiquement de preuves.

Or il faut constater, outre cette confusion, que personne ne remet en cause le principe de l'intime conviction du juge qui est largement complémentaire du système qui admet tout et rien comme mode de preuve, et notamment la preuve par témoignage...! Voilà un juge un peu léger, un peu jeune, un peu agacé... l'un raconte son agression, l'autre nie, et pouf ! La condamnation tombe. La Justice (pénale) est donc un système assez primaire.

C'est pourtant cela que l'on appelle la Justice.

Elle est d'ailleurs servie par d'autres règles - système de textes et principes - qui la laisse à cette hauteur. Là-dessus faites entrer des jurés avec une poignée d'entre eux qui n'ont comme seule pertinence que leur carte d'électeur, bêtes comme leur pied, et alors là vous arrivez à des séances qui peuvent tourner au carnaval judiciaire. Sans avoir tout compris du système US, il est à peu près aussi stupide que le nôtre. Mais à droite comme à gauche on s'en satisfait - que reste-t-il de l'affaire d'Outreau ? Un film sans doute, mais sans doute pas un système de preuve pénale rénové.

La barbarie judiciaire peut continuer ! Sauf si DSK est élu ? Le fait de ne pas être pénaliste permet ce ton "musclé" qui ne passerait dans aucune revue (vive les blogs). Revenons à l'affaire où l'on doit, pour commentaires, se contenter de mesurer les petites barbaries de l'espèce par rapport à la barbarie ordinaire de tout système judiciaire.

Les erreurs du procureur New Yorkais tiennent peut-être un peu au système américain mais surtout à lui. Ce qui a marqué les esprits, c'est que, au-delà des premiers jours de rétention qui peuvent se justifier pour pouvoir interroger la personne de façon continue, c'est de s'être opposé à une liberté surveillée normale : de demander l'incarcération, que l'affaire a pu avoir un écho démesuré.

La défense a donc dû proposer une caution élevée (1 million de dollars) , une sorte d'hypothèque (5 M de dollars), un bracelet électronique, bref proposer une sorte d'assignation à résidence-prison avec vigiles très coûteuse qui a fait sensation dans les médias. L'argent et tout un tralala pour trouver une résidence à New York a donné une comédie incroyable puisque les médias font du moindre fait tout un événement et que le public, plus bas que bas, plus bête que bête, adore cette consommation. Penser que DSK pouvait s'enfuir alors que son visage était à la une des tous les médias était sans doute une erreur d'appréciation, et c'est elle qui a donné toute son importance à l'affaire.

Si, après une mise en accusation, le procureur avait dit "il convient maintenant de vérifier tout cela", sans abuser des médias, l'affaire aurait pris un tour plus calme. Les excès de là-bas peuvent exister ici, selon la personnalité du procureur et les communications faites à la presse, l'impact sur le public sera fort différent. Ainsi, la présomption d'innocence doit pour partie être respectée (...) par l'accusation.

Néanmoins, l'accusation ne sera jamais que ce qu'elle est : une vision unilatérale.

Le débat sur le juge d'instruction qui instruit à charge et à décharge va donc retrouver un intérêt particulier ! Le système judiciaire américain ne pourra plus être : certains criminologues qui ne font que répéter quelques traits américains, de la tolérance zéro à la suppression du juge d'instruction, vont devoir pour une fois se creuser la cervelle pour formuler des propositions pertinentes.

Au total, l'éducation est la seule voie de progrès exploitable sans délai. Etre accusé ce n'est pas être coupable et le public ne doit pas acheter la presse sans nuance, réserve et véritables interrogations. Il ne doit pas croire les médias. Le citoyen ne peut sans doute pas s'empêcher d'avoir une opinion, mais il faut qu'il la garde en son for intérieur et s'en tienne à une parole : attendons que le processus judiciaire (fort imparfait) permette à l'accusé de s'être pleinement défendu.

Ainsi, d'une affaire en cours, on ne doit rien penser ! Ou ne penser qu'une chose : qu'elle est en cours ! En effet, les opinions sont construites sur des faits approximatifs, vols à l'avocat, au procureur, au greffe, à la partie civile... Tout raisonnement un un bricolage honteux... duquel il ne résulte que de nombreuses catastrophes (mais parfois la presse interrompt le délire de quelques juges...). La présomption d'innocence exige de s'en tenir à cette discipline du silence.

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