Humanisme et raison juridique, #directdroit par Hervé CAUSSE

Autant en emporte le code... informatique. Ou la fin des juristes. Vers le nouveau conseil.



Soleil Noir de JC ROY Saint-Pierre et Miquelon
Soleil Noir de JC ROY Saint-Pierre et Miquelon
Autant en emporte le code... la révolution en marche n'est pas (seulement) une révolution technologique. C'est une révolution sociale et culturelle. La technologie certes gagne en puissance, les esprits de l'internet fondent de nouveaux espaces. Mon bon droit commercial est en 4 plans, 4 dimensions : la vie économique se structure en plusieurs plans.

Avoir réfléchi à la confrontation économie réelle / finance (économie financière), usez de la barre de recherche sur ce thème, on devine une société multi-plans. Le conseil juridique exige de savoir dans quelle dimension on est : la dimension d'une ICO n'est pas de celles jusqu'alors connues. Il faut alors inventer...

Il est amusant de voir une galerie de juristes parisiens annoncer des initiatives et, régulièrement, poser sur des photos consensuelles. Les juristes n'ont jamais été au courant de l'économie de l'informatique ni même de celle de l'internet (bien sûr j'accuse le trait). Mais, tout de suite, sans préparation, ils se voudraient être des acteurs de l'intelligence artificielle. Quelle conversion !

Cette mobilisation n'est pas une prise de conscience. Elle est juste une réaction, un sursaut de l'ancien monde, qui sent qu'il va mourir. La preuve en est que les juristes parlent de l'IA pour parler d'eux : de la justice, de la relation client ou des systèmes. Ces sujets autocentrés montrent un réflexe type d'ancien monde.

Ce monde c'est celui venu du XVIIIe siècle où le précieux et l'obséquieux, le creux et le peureux, ceux d'une aristocratie finissante, ont été légués, au XIXe siècle, à la bourgeoisie républicaine.

Elle n'y a jamais renoncé sans jamais établir une République des idées neuves.

La bourgeoisie a fait le commerce et l'industrie. Quelques écoles d'ingénieurs aussi. Mais elle a perpétué ces valeurs de castes finissantes qui sont en train de fondre au soleil comme les monopoles, les exclusivités, les réserves d'activités, les corps (grands corps d'Etat malades ou petits corps locaux... ), les postes (les emplois ? tirés sur l'impôt et il n'y en a plus)... Ces catégories sont le vecteur de l'inégalité (à vie, quand on a une fonction reconnue) et donc de l'égoïsme, loin de la fraternité, La seule liberté : reproduire son milieu.

Les juristes, conservateurs amusés, souvent subtils, paradent dans cette société faite de mots et non de réalités. Les titres les honneurs, les décorations, les places, les nominations, les concours... ont été théorisés par un Droit vendu à un intérêt général imaginaire. Deux cents ans après avoir inventé la loi, un truc abstrait venant d'un autre truc abstrait (la volonté générale), on s'est demandé s'il ne fallait pas réfléchir à son efficacité (les études d'impact ?)...

Bon, le code informatique donne des solutions claires, nettes, tranchantes... de vrais plans en deux parties (Oui / Non ; Un / Une ; Un / Des ; Le / La) dont le contenu ne peut varier de l'annonce comme c'est si souvent le cas dans la littérature juridique. La place est réduite pour les petits avantages qui, au terme de 10 ans, font les grandes différences. L'efficacité immédiate est la seule réalité acceptable. La justice est dans le tweet, dans le jugement immédiat et de masse : l'image propulsée 30 fois par jour pendant 2 jours. Un ouragan médiatique contre une Justice énigmatique. Voilée. Muette. Absente ?

La société technologique a changé la société vieillie, inégalitaire.

L'esprit humain a déjà changé.

L'économie a déjà changé.

Et les juristes n'y sont pas dedans (oh RGPD... illusion que tu es...).

Le Droit transpire la vieillesse et l'usure.

Autant en emporte le code, informatique : des juges et des avocats, des juristes volubiles, des formateurs creux... L'intelligence artificielle va mettre en chapitres et sections claires des millions de règles, les réciter ne servira plus à rien, la machine les calera : les lire ou les dire ne suffira pas.

Le juriste actuel ne suffira pas.

Se livrer à quelques interprétations et à des longs discours de ce qui est écrit ailleurs ne servira plus à rien. Il faudra inventer de nouveaux concepts juridiques, de nouvelles méthodes.

Mais quel juriste a déjà attaché un nouveau concept juridique à son nom ou à son activité ? Bernard Teyssié a inventé les groupes de contrats... Il faudrait, dans les formations juridiques, un semestre entier consacré à l'invention juridique : de quoi mettre sur le carreau pas mal de monde.

Les juristes sont en mode faillite programmée. Balayés par le code informatique. En témoigne leur affirmation parfaitement concordante et donc fausse selon laquelle il faudra toujours un juge, un avocat, un médiateur, un X ou un Y, voire un professeur. Le propos est vrai, il faudra toujours des juristes, mais à hauteur de 50 % de la masse actuelle.

Ce bilan et cet avenir sombre, comme le Soleil Noir de jean-Claude ROY, ne sont pas du pessimisme.

Le Droit dégénère toujours en des sortes d'activités administratives (faire des statuts... un contrat de travail...). 7 à 10 clics et basta... Reste à savoir qui et comment on fera le nouveau Droit. Il faudra lui donner de la hauteur, comprendre les crédit dans son essence et ses trois caractéristiques, et non le décliner en mille pages de récitations. Inutiles à entendre et à prononcer : l'application donnera l'acte juridique en 7 clics.

Le nouveau Droit.

Quel est-il ?

Ce droit de demain ?

Ce Droit qui ne va tolérer que l'intelligence pure au mépris des traditions dont on ne sait plus les fondements. Le conseil va donc changer. Le conseil ne sera plus technique mais un brin philosophique pour que l'acteur sente ses responsabilités plus qu'on ne les lui définira dans une note détaillée.

Le juriste : un artiste du demain. L'inverse d'aujourd'hui : un besogneux du hier.

Entendez, la terre tremble.





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