Humanisme et raison juridique, #directdroit par Hervé CAUSSE

Le conseil de régulation financière et du risque systémique (CRFRS) : Christine LAGARDE à la barre ! Les dirigeants d'entreprises à risque systémique bientôt auditionnés.



Le conseil de régulation financière et du risque systémique (CRFRS) : Christine LAGARDE à la barre ! Les dirigeants d'entreprises à risque systémique bientôt auditionnés.
L'intitulé de la loi qui crée ce nouveau conseil (loi sur la régulation bancaire) est très aguicheur, son contenu un peu moins, mais il est tout de même très symbolique. Nous nous arrêtons juste un instant sur la nouveau conseil qui remplace le collège des autorités de contrôle qui aura fait peu perler de lui. Ce nouveau conseil, présidé par le ministre, devra favoriser sinon réussir une "inter-régulation" (dirait notre collègue M.-A. Frison-Roche). Coordonner le travail de l'ACP, de l'AMF et de l'Autorité des normes comptables ; telle sera sa mission.

Aux termes de ce qui sera l'article L. 631-2., "Le conseil de régulation financière et du risque systémique est composé du gouverneur de la Banque de France président de l'autorité de contrôle prudentiel assisté du vice-président de cette autorité, du président de l'autorité des marchés financiers et du président de l'autorité des normes comptables ou de leurs représentants. Il est présidé par le ministre chargé de l'économie ou son représentant." (on se demandera au passage pourquoi les autorités qui sont des personnes morales ne portent pas, dans la loi, une majuscule... mais avouons que nous ne sommes jamais allé au bout de la problématique...)

Naturellement, cette mission du CRFRS se réalise "sans préjudice des compétences respectives des institutions que ses membres représentent" formule administrative peu utile à défaut de dérogation expresse et précise.

Le conseil exerce les missions suivantes :
« 1° Il veille à la coopération et à l'échange d'information entre les institutions que ses membres représentent ;
« 2° Il examine les analyses de la situation du secteur et des marchés financiers et il évalue les risques systémiques qu'ils comportent, compte tenu des avis et recommandations du comité européen du risque systémique ;
« 3° Il facilite la coopération et la synthèse des travaux d'élaboration des normes internationales et européennes applicables au secteur financier et peut émettre tout avis ou prise de position qu'il estime nécessaire.

La disposition ne se commente guère, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de difficulté de mise en oeuvre. Comment le ministre va-t-il parvenir à stimuler les autorités et leurs dirigeants sans les incommoder ? Ces autorités spécialisées, "autonomisées" ont-elles besoin d'être stimulées ? La régulation a-telle besoin d'être régulée ? Le citoyen et le contribuable pourraient s'en inquiéter. Et comment le ministre va-t-il procéder ?

Ce n'est en tout cas pas le droit, propre, d'entendre des professionnels de la banque, de l'assurance et de la finance (droit d'audition qui devient une obligation pour les dirigeants de société), qui changera la problématique. En effet, une fois voté, l'article L. 631-2-2 devrait prévoir que, pour l'accomplissement des missions définies à l'article L. 631-2-1, le conseil de régulation financière et du risque systémique peut entendre des représentants des établissements de crédit, des entreprises d'investissement, des entreprises d'assurance, des mutuelles et des institutions de prévoyance. ».

Ce droit d'audition "personnalise" et "politise" les questions de gestions des entreprises à risque systémique. Cela sera-t-il une arme ou un moyen décisif, on se le demande. On devine que le nouveau conseil voudra ou pourra jouer d'un rôle d'influence, technique assez répandue dans la régulation.

Les dirigeants de banques et assurances vont s'interroger.

Auront-ils le droit d'être assistés par un avocat ?

Par un conseil autre ?

Par leurs collaborateurs ?

Leurs auditions seront-elles consignées ? Signées par eux ? Publiques ?

Autant de question qui ne sont peut-être pas, à cette heure, tranchées ou même posées.Cessons d'être mauvais esprit... et souhaitons bon courage à ceux qui vont devoir, aux côtés du ministre, porter ce CNRFRS qui pourrait demain être vu comme un responsable des nouvelles crises financières... La petite innovation juridique implique en effet un grand risque politique : curieux !



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