Les banques se laissent alarmer par des décisions "surinterprétées" ; en voilà une qui le leur dit et qui les rassurera :
"la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, n'est pas tenue, en cette seule qualité, d'une obligation de conseil envers l'emprunteur, sauf si elle en a pris l'engagement, ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée".
Cet attendu a beau être celui d'un arrêt non publié (inédit), il est d'une clarté à renverser de nombreuses certitudes doctrinales. Placer au fronton d'un ouvrage les obligations du banquier ne les rend pas plus certaines que les répéter.
Cet arrêt rappelle le droit positif - pour un crédit - que se chargent d'embrouiller d'autres plumes !
A force de lire que le banquier a cent obligations, certains lecteurs le croient et le répètent sans lire les arrêts dont il s'agirait de dire qu'ils portent un principe ou au moins une règle.
Redisons sentencieusement la chose qui est en deux temps dans cette décision, le banquier n'est tenu :
ni "d'une obligation de conseil envers l'emprunteur" ;
"... ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée".
Attention, l'arrêt est cité pour le thème du conseil, et ne croyez pas que la grande jurisprudence sur la mise en garde est supprimée avec la seconde assertion. Attention, on est ici sur les services de crédits et non sur les autres services (incluant divers contrats) où, à chaque fois, les règles changent (adieu le droit bancaire... vive le droit des (divers) services bancaires et financiers).
Nous ne spéculons pas davantage et on ne peut que regretter que, notamment, "l'idée vague d'obligation d'information et de conseil" soit utilisée avec la force de l'évidence, y compris pour des arrêts qui ne comportent pas cette expression (et presque dans aucun autre...).
On a dit cela sur l'obligation de vigilance, ici même, à plusieurs reprises, mais nombre de publications entretiennent le mythe...
Il faudra que les clients engagent la responsabilité des avocats qui leur font perdre 5 ans de procédure ! 5 ans à poursuivre une banque qui n'a pas pu violer une obligation qu'elle n'a pas (...) ! ... Alors peut-être que l'on modifiera sensiblement le discours. Les auteurs eux sont juridiquement irresponsables...
On termine : "sauf si elle en a pris l'engagement", indique l'arrêt qui fait une réserve ; oui le banquier est un commerçant et il est libre, libre de vendre des conseils, ce qu'il fait sans doute trop peu et on finit par ignorer qu'il le peut. Mais c'est un livre qu'il faudrait consacrer à la chose...
A relire François GRUA, qui disait avec nuance, précision et intelligence les choses, on se dit que les distorsions entre le droit positif et ce que l'on en dit (et croit), tient peut-être au fait qu'on est, avec certaines obligations subtiles, sur des litiges d'espèces que l'on a voulu instrumentaliser pour en faire des litiges de masse. C'est en partie devenu le cas, mais les clients qui attaquent leur banque en visant grossièrement les obligations dilatées par les auteurs et professionnels du droit en payent le prix.
"la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, n'est pas tenue, en cette seule qualité, d'une obligation de conseil envers l'emprunteur, sauf si elle en a pris l'engagement, ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée".
Cet attendu a beau être celui d'un arrêt non publié (inédit), il est d'une clarté à renverser de nombreuses certitudes doctrinales. Placer au fronton d'un ouvrage les obligations du banquier ne les rend pas plus certaines que les répéter.
Cet arrêt rappelle le droit positif - pour un crédit - que se chargent d'embrouiller d'autres plumes !
A force de lire que le banquier a cent obligations, certains lecteurs le croient et le répètent sans lire les arrêts dont il s'agirait de dire qu'ils portent un principe ou au moins une règle.
Redisons sentencieusement la chose qui est en deux temps dans cette décision, le banquier n'est tenu :
ni "d'une obligation de conseil envers l'emprunteur" ;
"... ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée".
Attention, l'arrêt est cité pour le thème du conseil, et ne croyez pas que la grande jurisprudence sur la mise en garde est supprimée avec la seconde assertion. Attention, on est ici sur les services de crédits et non sur les autres services (incluant divers contrats) où, à chaque fois, les règles changent (adieu le droit bancaire... vive le droit des (divers) services bancaires et financiers).
Nous ne spéculons pas davantage et on ne peut que regretter que, notamment, "l'idée vague d'obligation d'information et de conseil" soit utilisée avec la force de l'évidence, y compris pour des arrêts qui ne comportent pas cette expression (et presque dans aucun autre...).
On a dit cela sur l'obligation de vigilance, ici même, à plusieurs reprises, mais nombre de publications entretiennent le mythe...
Il faudra que les clients engagent la responsabilité des avocats qui leur font perdre 5 ans de procédure ! 5 ans à poursuivre une banque qui n'a pas pu violer une obligation qu'elle n'a pas (...) ! ... Alors peut-être que l'on modifiera sensiblement le discours. Les auteurs eux sont juridiquement irresponsables...
On termine : "sauf si elle en a pris l'engagement", indique l'arrêt qui fait une réserve ; oui le banquier est un commerçant et il est libre, libre de vendre des conseils, ce qu'il fait sans doute trop peu et on finit par ignorer qu'il le peut. Mais c'est un livre qu'il faudrait consacrer à la chose...
A relire François GRUA, qui disait avec nuance, précision et intelligence les choses, on se dit que les distorsions entre le droit positif et ce que l'on en dit (et croit), tient peut-être au fait qu'on est, avec certaines obligations subtiles, sur des litiges d'espèces que l'on a voulu instrumentaliser pour en faire des litiges de masse. C'est en partie devenu le cas, mais les clients qui attaquent leur banque en visant grossièrement les obligations dilatées par les auteurs et professionnels du droit en payent le prix.
texte de la base publique Légifrance.
Cour de cassation
chambre commerciale]b
Audience publique du mercredi 5 décembre 2018
N° de pourvoi: 17-17257
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Mouillard (président), président
SCP Boutet et Hourdeaux, avocat(s)
...
Donne acte à la société Cofidis du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre M. Z..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eurofrance Solaire ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 7 juin 2011, M. et Mme X... (les emprunteurs) ont accepté l'offre de crédit émise par la société Groupe Sofemo, aux droits de laquelle est venue la société Cofidis, (le prêteur) en vue de financer l'installation d'un système solaire photovoltaïque, commandée, le même jour, par M. X... à la société Eurofrance Solaire (le vendeur), ultérieurement mise en liquidation judiciaire ; que les panneaux photovoltaïques ont été posés par la société Seven Seventy Solar (l'installateur), qui était assurée auprès de la société Axa France IARD ; qu'invoquant l'absence de fonctionnement de l'installation, M. et Mme X... ont obtenu, en référé, la désignation d'un expert, puis l'extension des opérations d'expertise à l'assureur de l'installateur et au liquidateur du vendeur et, enfin, la suspension du paiement des échéances du prêt ; que le prêteur a assigné en paiement des échéances du prêt les emprunteurs, lesquels ont recherché sa responsabilité pour avoir financé sans discernement les activités du vendeur ;
Attendu que pour condamner le prêteur à payer aux emprunteurs des dommages-intérêts pour manquement à son obligation de conseil et ordonner la compensation de cette créance avec leur dette au titre de la restitution du capital consécutive à la résolution du contrat de prêt, l'arrêt retient que la production par le prêteur d'une très volumineuse jurisprudence relative au contentieux né de l'installation de matériel photovoltaïque financée par les sociétés Sofemo ou Cofidis montre qu'en tant que professionnel avisé, il se devait, dans l'exécution de son obligation de conseil, d'alerter les emprunteurs, candidats au prêt lié à ce type d'installation, sur les difficultés d'un tel projet et que ce manquement leur a fait perdre une chance de ne pas contracter ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, n'est pas tenue, en cette seule qualité, d'une obligation de conseil envers l'emprunteur, sauf si elle en a pris l'engagement, ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE,
Cour de cassation
chambre commerciale]b
Audience publique du mercredi 5 décembre 2018
N° de pourvoi: 17-17257
Non publié au bulletin Cassation partielle
Mme Mouillard (président), président
SCP Boutet et Hourdeaux, avocat(s)
...
Donne acte à la société Cofidis du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre M. Z..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société Eurofrance Solaire ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, le 7 juin 2011, M. et Mme X... (les emprunteurs) ont accepté l'offre de crédit émise par la société Groupe Sofemo, aux droits de laquelle est venue la société Cofidis, (le prêteur) en vue de financer l'installation d'un système solaire photovoltaïque, commandée, le même jour, par M. X... à la société Eurofrance Solaire (le vendeur), ultérieurement mise en liquidation judiciaire ; que les panneaux photovoltaïques ont été posés par la société Seven Seventy Solar (l'installateur), qui était assurée auprès de la société Axa France IARD ; qu'invoquant l'absence de fonctionnement de l'installation, M. et Mme X... ont obtenu, en référé, la désignation d'un expert, puis l'extension des opérations d'expertise à l'assureur de l'installateur et au liquidateur du vendeur et, enfin, la suspension du paiement des échéances du prêt ; que le prêteur a assigné en paiement des échéances du prêt les emprunteurs, lesquels ont recherché sa responsabilité pour avoir financé sans discernement les activités du vendeur ;
Attendu que pour condamner le prêteur à payer aux emprunteurs des dommages-intérêts pour manquement à son obligation de conseil et ordonner la compensation de cette créance avec leur dette au titre de la restitution du capital consécutive à la résolution du contrat de prêt, l'arrêt retient que la production par le prêteur d'une très volumineuse jurisprudence relative au contentieux né de l'installation de matériel photovoltaïque financée par les sociétés Sofemo ou Cofidis montre qu'en tant que professionnel avisé, il se devait, dans l'exécution de son obligation de conseil, d'alerter les emprunteurs, candidats au prêt lié à ce type d'installation, sur les difficultés d'un tel projet et que ce manquement leur a fait perdre une chance de ne pas contracter ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, n'est pas tenue, en cette seule qualité, d'une obligation de conseil envers l'emprunteur, sauf si elle en a pris l'engagement, ni d'une obligation de mise en garde sur les risques de l'opération financée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE,