Après avoir commenté plusieurs arrêts sur le contrôle technique, ici et ailleurs, il nous plaît de signaler un arrêt inédit de la Cour de cassation (pourvoi : 05-12955). Il témoigne, une fois encore, de la négligence et de la difficulté de la mission du contrôle technique.
Ce contrat est en pleine actualité. La DGCCRF vient de signaler que nombre de consommateurs se plaignent (Le Monde, 30 déc. 2006, p.10). En quelques années, des obligations de contrôle ont été créées, singulièrement dans le domaine immobilier. Tout est un peu mélangé car, par exemple, le mesurage d’un bien immobilier n’est pas à proprement parler un contrôle technique, bien qu’il soit (et encore) un travail d’expertise (non-judiciaire).
L’enquête de la Direction de la concurrence révèle que le secteur a vu apparaître des professionnels peu compétents. Il faut être assis pour apprendre que les pouvoirs publics imaginent créer, pour juillet prochain, un examen délivré par des « organismes habilités » apprend l’article du Monde. C’est à peine croyable, et il est vrai que dans le strict domaine de l’immobilier, pour le contrôle technique concernant la sécurité des bâtiments, on n’en est pas là… Heureusement ! Mais la question se pose pour l’amiante, le plomb, les termites, pour le certificat de performance énergétique depuis novembre 2006… demain pour l’installation des réseaux (gaz, électricité), Là où l’incompétence règne, les problèmes se multiplient (facturation exagérée, publicité trompeuse…).
L’arrêt signalé se place sur le terrain classique de la sécurité de l’immeuble. Une très grande société (on est dans une configuration d’oligopole), la SOCOTEC, est en cause. A la faveur de sa compétence, et de la spécialisation de ses avocats, elle s’en était « tiré » en appel. La Cour de cassation remet en cause cette exonération de responsabilité civile. La Cour d’appel avait retenu que la réglementation interdit au contrôleur technique de s'immiscer dans la conception ou l'exécution des ouvrages, et que ce contrôleur ne dispose d'aucun pouvoir de décision ou de coercition sur le chantier, son rôle n'étant pas de s'assurer que ses avis sont suivis d'effet.
C’est le genre de motif qui ressemble à un cours sur la mission du contrôleur technique qu’à une réponse à un plaignant. Il est vrai, c’est tout l’intérêt du sujet, qu’une question de définition de la mission existe. Dans une certaine mesure, comme on pu le juger les juges d’appel, cette définition implique ou pas telle obligation pour l’entreprise.
Depuis quelques années, notre travail s’est justement porté sur le sujet car, justement, la Cour de cassation opère un contrôle très précis sur le contrat de contrôle technique et sur les obligations qu’il comporte au vu de nombreux arrêts publiés (ce qui permet ici de relater un arrêt non-publié au Bulletin des arrêts de la Cour).
En l’espèce, la cassation intervient seulement pour un défaut de base légale. Les conclusions du client étaient bien rédigées : il était demandé à la Cour d’appel de vérifier, si, du fait des non-conformités ou des malfaçons, il n'était pas porté atteinte à la solidité de certains ouvrages que la société SOCOTEC avait la charge de contrôler. La Cour de cassation considère que ce travail juridique de vérification, de qualification des diligences accomplies, n’a pas été effectué.
Très simplement, la Haute Juridiction indique donc que le contrôleur technique n’a pas vérifié si les « modifications réalisées ne compromettaient pas la sécurité des installations », « ce dont le contrôleur technique aurait dû se préoccuper », phrase qui signe d’un brin d’autorité le contenu de la mission du contrôleur. Le contrôle de la Cour de cassation aura dû, ici, facile à exercer. La date du diagnostic ou son contenu ou bien les deux n’auront pas mentionné une modification dans la construction.
Le point de contrôle (de cassation) était donc purement formel et facile à opérer. La mission de contrôle a été probablement méconnue si le contrôleur n’avait pas pris acte de la modification, ce qui laisse penser qu’il ne l’a pas vue. Pour être exonéré, il faudra donc que le contrôleur prouve qu’il a eu connaissance de la modification et qu’il a notifié (par le PV de diagnostic) au propriétaire de l’ouvrage le risque qui y était attaché.
Cela évoque l’art de la rédaction du procès-verbal de diagnostic, plus que celui de la rédaction de la mission dans le contrat. Le contrôleur doit dire ce qu’il contrôle, voire comment il contrôle. Il ne suffit pas de dire, à la fin d’un imprimé : RAS. La leçon vaut pour toutes les sociétés, y compris les grandes comme la SOCOTEC. Messieurs les ingénieurs et contrôleurs, laissez tantôt vos calculettes et instruments, prenez votre plume !
Extrait de l’arrêt du 21 juin 2006 :
« Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour mettre hors de cause la société Socotec du chef des non-conformités contractuelles, l'arrêt retient que la réglementation interdit au contrôleur technique de s'immiscer dans la conception ou l'exécution des ouvrages, et que ce contrôleur ne dispose d'aucun pouvoir de décision ou de coercition sur le chantier, son rôle n'étant pas de s'assurer que ses avis sont suivis d'effet ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, du fait des non-conformités ou des malfaçons, il n'était pas porté atteinte à la solidité de certains ouvrages que la société Socotec avait la charge de contrôler, et sans vérifier si des modifications réalisées ne compromettaient pas la sécurité des installations, ce dont le contrôleur technique aurait dû se préoccuper, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ».
Ce contrat est en pleine actualité. La DGCCRF vient de signaler que nombre de consommateurs se plaignent (Le Monde, 30 déc. 2006, p.10). En quelques années, des obligations de contrôle ont été créées, singulièrement dans le domaine immobilier. Tout est un peu mélangé car, par exemple, le mesurage d’un bien immobilier n’est pas à proprement parler un contrôle technique, bien qu’il soit (et encore) un travail d’expertise (non-judiciaire).
L’enquête de la Direction de la concurrence révèle que le secteur a vu apparaître des professionnels peu compétents. Il faut être assis pour apprendre que les pouvoirs publics imaginent créer, pour juillet prochain, un examen délivré par des « organismes habilités » apprend l’article du Monde. C’est à peine croyable, et il est vrai que dans le strict domaine de l’immobilier, pour le contrôle technique concernant la sécurité des bâtiments, on n’en est pas là… Heureusement ! Mais la question se pose pour l’amiante, le plomb, les termites, pour le certificat de performance énergétique depuis novembre 2006… demain pour l’installation des réseaux (gaz, électricité), Là où l’incompétence règne, les problèmes se multiplient (facturation exagérée, publicité trompeuse…).
L’arrêt signalé se place sur le terrain classique de la sécurité de l’immeuble. Une très grande société (on est dans une configuration d’oligopole), la SOCOTEC, est en cause. A la faveur de sa compétence, et de la spécialisation de ses avocats, elle s’en était « tiré » en appel. La Cour de cassation remet en cause cette exonération de responsabilité civile. La Cour d’appel avait retenu que la réglementation interdit au contrôleur technique de s'immiscer dans la conception ou l'exécution des ouvrages, et que ce contrôleur ne dispose d'aucun pouvoir de décision ou de coercition sur le chantier, son rôle n'étant pas de s'assurer que ses avis sont suivis d'effet.
C’est le genre de motif qui ressemble à un cours sur la mission du contrôleur technique qu’à une réponse à un plaignant. Il est vrai, c’est tout l’intérêt du sujet, qu’une question de définition de la mission existe. Dans une certaine mesure, comme on pu le juger les juges d’appel, cette définition implique ou pas telle obligation pour l’entreprise.
Depuis quelques années, notre travail s’est justement porté sur le sujet car, justement, la Cour de cassation opère un contrôle très précis sur le contrat de contrôle technique et sur les obligations qu’il comporte au vu de nombreux arrêts publiés (ce qui permet ici de relater un arrêt non-publié au Bulletin des arrêts de la Cour).
En l’espèce, la cassation intervient seulement pour un défaut de base légale. Les conclusions du client étaient bien rédigées : il était demandé à la Cour d’appel de vérifier, si, du fait des non-conformités ou des malfaçons, il n'était pas porté atteinte à la solidité de certains ouvrages que la société SOCOTEC avait la charge de contrôler. La Cour de cassation considère que ce travail juridique de vérification, de qualification des diligences accomplies, n’a pas été effectué.
Très simplement, la Haute Juridiction indique donc que le contrôleur technique n’a pas vérifié si les « modifications réalisées ne compromettaient pas la sécurité des installations », « ce dont le contrôleur technique aurait dû se préoccuper », phrase qui signe d’un brin d’autorité le contenu de la mission du contrôleur. Le contrôle de la Cour de cassation aura dû, ici, facile à exercer. La date du diagnostic ou son contenu ou bien les deux n’auront pas mentionné une modification dans la construction.
Le point de contrôle (de cassation) était donc purement formel et facile à opérer. La mission de contrôle a été probablement méconnue si le contrôleur n’avait pas pris acte de la modification, ce qui laisse penser qu’il ne l’a pas vue. Pour être exonéré, il faudra donc que le contrôleur prouve qu’il a eu connaissance de la modification et qu’il a notifié (par le PV de diagnostic) au propriétaire de l’ouvrage le risque qui y était attaché.
Cela évoque l’art de la rédaction du procès-verbal de diagnostic, plus que celui de la rédaction de la mission dans le contrat. Le contrôleur doit dire ce qu’il contrôle, voire comment il contrôle. Il ne suffit pas de dire, à la fin d’un imprimé : RAS. La leçon vaut pour toutes les sociétés, y compris les grandes comme la SOCOTEC. Messieurs les ingénieurs et contrôleurs, laissez tantôt vos calculettes et instruments, prenez votre plume !
Extrait de l’arrêt du 21 juin 2006 :
« Vu l'article 1147 du code civil ;
Attendu que pour mettre hors de cause la société Socotec du chef des non-conformités contractuelles, l'arrêt retient que la réglementation interdit au contrôleur technique de s'immiscer dans la conception ou l'exécution des ouvrages, et que ce contrôleur ne dispose d'aucun pouvoir de décision ou de coercition sur le chantier, son rôle n'étant pas de s'assurer que ses avis sont suivis d'effet ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si, du fait des non-conformités ou des malfaçons, il n'était pas porté atteinte à la solidité de certains ouvrages que la société Socotec avait la charge de contrôler, et sans vérifier si des modifications réalisées ne compromettaient pas la sécurité des installations, ce dont le contrôleur technique aurait dû se préoccuper, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ».