Le droit des services de paiement : de l'éventuelle faute du client dans l'utilisation des données d'une carte bancaire (Cass. com., 18 janv. 2017, commentaire dans LEXBASE)



Vive le droit des services de paiement ! L'utilisation d'une carte bancaire pour générer des cartes virtuelles donne une série de décisions significatives qui appliquent le pur droit des services de paiement (Cass. com., 18 janv. 2017). L'utilisation de la carte est intervenu dans un système spécial de cartes virtuelles qui place parfaitement dans le nouveau droit, finalement peu appliqué en dix ans.

Il existe de multiples niveaux de commentaires de cette application du Code monétaire et financier.

Nous avons donc essayé d'en faire une analyse assez complète :

LEXBASE, Hebdo édition affaires, mars 2017, Edition n°501 du 09/03/2017, H. Causse, L'émetteur d'un instrument de paiement assume les paiements non autorisés, sauf preuve de négligence grave du client
Ref. : Cass. com., 18 janvier 2017, n° 15-18102, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0605S9B)


Le sens de ces décisions était prévisible. La preuve de la fraude ou de la négligence grave de l'utilisateur de services de paiement (notion légale et condition légalement exigée) doit être rapportée par l'établissement dans lequel le compte est ouvert ; cette preuve ne peut se déduire du seul fait que l'instrument de paiement a été effectivement utilisé (Cass. com., 18 janv. 2017, n° 15-18102).

La responsabilité des établissements est donc écrasante ; sauf le cas où le client déclare devant un policier s'être fait dérober sa carte (notamment elle) avec le code confidentiel... et la notice d'emploi ?..., le professionnel sera dans l'incapacité pratique de rapporter cette preuve.

La solution avait déjà été donnée sous l'empire des textes antérieurs à la DSP et à sa transposition (le seul usage du code d’une carte de paiement ne suffit pas à prouver une négligence valant faute lourde : sous le droit ancien : Cass. 1re civ., 28 mars 2008, n° 07-10186 : Bull. I, n° 91 ; Cass. com., 21 sept. 2010, n° 09-16534, la carte avait été volée dans une voiture).

À l’inverse, il avait été jugée une faute lourde du client déduite de l’aveu à la police que le code était avec la carte dans sa voiture (sous le droit ancien : Cass. com., 16 oct. 2012, n° 11-19981 : Bull. IV, n° 183 ; voyez Droit bancaire et financier, n° 1136 et la note, et n° 1115).

On peut en être choqué, ou s'en ravir, mais tel est le droit positif ; les professionnels doivent donc assumer ce risque, ce qu'ils savent faire sur des grandes masses : plusieurs dizaines de millions de clients...

L'arrêt donne l'occasion de rappeler que la Directive services de paiement (DSP) a fait entrer le droit français dans une ère nouvelle. Cette séries de décisions en donne l'occasion. Il n'était pas facile de le souligner tellement ce nouveau droit, croyons-nous, est éloigné du "droit des instruments de paiement" que la doctrine a tenté d'inventer, il y a une quinzaine d'années, à la place du droit des effets de commerce (l'enseignement traditionnel). Ce dernier plongeait davantage dans le XIXe siècle que dans le XXIe.

On ne pouvait trop le souligner puisque les dix notions majeures de la DSP n'existaient en droit français. La plupart des notions ont été légalement définies, dont celle d'instrument de paiement, et de façon assez remarquable : elle ouvre sur une possible dématérialisation de la plupart des instruments et se couple à une liberté de création que les auteurs ne présentaient pas naguère.

Le droit des services de paiement a inventé d'un coup d'un seul tout un secteur fondé sur des mécanismes assez précis et neufs. Merci l'Europe ?

L'étude de ce droit des services de paiement reste encore difficile d'approche ou d'accès. Les étudiants doivent le savoir, pour leur avenir professionnel : les spécialistes seront les bienvenus dans les banques... et mille autres entreprises technologiques ou de l'industrie qui développent des systèmes de paiement.

On donne ci-dessous le lien d'un commentaire qui ancre la décision dans deux précédents, celui du 28 mars 2008 précité, mais aussi un arrêt du 21 mars 2010 sur le bordereau Dailly qui ne nous semble pas éclairant car, avec ces récentes décisions, c'est la DSP qui est ici purement appliquée :

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