Il manque une politique pour financer l'économie européenne, mais la BCE est contente d'elle-même



 Il manque une politique pour financer l'économie européenne, mais la BCE est contente d'elle-même
Le plan de relance économique s'appelle en France "pacte de compétitivité pour l'emploi", il produira des effets, mais il faudra aussi établir une politique monétaire sans laquelle un plan économique européen est impossible. Un entretien dans Les Echos des16 et 17 novembre 2012, de M. Benoît COEURE, membre du directoire de la BCE, fait un point sur la grande crise dans laquelle la politique budgétaire folle nous a conduit, relayée par les abus de certains banquiers. A travers lui, ou d'autres (v. un autre membre de la BCE : P. PRAET, Le Figaro, 19 déc. 2012, p. 25), la BCE semble surtout contente d'elle-même.

Pour la France, la dette supplémentaire de ces cinq dernières années nous met au bord du gouffre, et la question de la relance économique est dans toute les têtes. Il faut relancer la machine et redonner confiance pour pouvoir verser des impôts à l'Etat et qu'il paye ses dettes, nos dettes. A tout instant nous pouvons passer du marasme à la crise au sens authentique du terme : doubler notre nombre de chômeurs et notre inflation... La politique sérieuse de gestion qui a été engagée en France doit être confirmée, pour en finir avec le laxisme précédent de l'absence de toute gestion menée sur un discours contraire...

Pour l'Europe, on cherche encore une politique économique d'ensemble pour sortir de ce sévère marasme. La question va bien vite se poser. Pour sortir par le haut, on pourrait espérer que la BCE inspire chaque Etat membre de l'Union européenne, sans se contenter de leur demander des réductions budgétaires ce sur quoi tout le monde est désormais d'accord (...), et ce qui ne suffit pas. L'invention d'une politique monétaire pourrait être ce déclencheur salvateur, mais elle ne peut se résumer à modifier le taux directeur de la BCE avec une mise en scène qui usera vite la population européenne (on communique avant la décision, on fait subodorer, on se réunit en conclave et on communique avec art après la réunion).

Cette politique monétaire ne peut pas non plus se résumer à décider d'acheter des obligations d'Etat italiennes, grecques... (programme dit OMT), alors surtout que, selon le traité européen elle ne peut les acquérir que de façon indirecte (c'est-à-dire après les avoir pris pris en garantie d'injections de liquidité collateral en anglais). Voilà qui terrorise les allemands sans rénover les circuits de l'argent. Et les taux bas montrent que cela ne suffit pas à relancer l'économie avec les structures actuelles de la finance : voyez le marché de l'immobilier de ce début d'année, les taux sont à 3% et l'activité est atone.

Avoir tiré les leçons de la crise de 1929 en donnant de la liquidité aux banques, et en évitant quelques faillites et le risque de crise aigüe, ne suffira pas non plus quand l'Europe verra globalement le chômage augmenter. Et il ne suffira pas alors de dire que la concurrence, comme l'a dit M. COEURE il y a quelques mois, est un facteur de relance. La concurrence est pour la plupart des employés et salariés déjà subie fortement et les transformations imposées cassent des vies et fait du chômage. Si le modèle global était plus convainquant, depuis 25 ans, les populations seraient plus enclines aux efforts.

Il faut un nouveau souffle, sauf à accepter pour 25 ans des millions de chômeurs, une nouvelle politique économique. Elle pourrait être portée par une nouvelle politique monétaire. Une action puissante mais de longue haleine qui change les choses, modifiant les marchés et donnant de la liquidité là où il en faut, et non pas seulement sur les Etats ou les banques. Voilà ce que serait une politique monétaire. Limpide et forte elle donnerait confiance aux marchés et donc aux investisseurs pendant des années, et non pour quelques mois comme c'est le cas actuellement. Ce serait un politique pour faire redémarrer l'économie et non pas seulement pour sauver quelques banques...

Bref, le coup à l'italienne de Mario DRAGHI du programme OMT est assez brillant - mais il pourrait ne pas être durable si les Etats voient encore leur notation diminuée. En effet, la BCE ne peut pas racheter toutes les obligs d'Etats surendettés à moins de trois ans : si elle devait avoir à le faire, en quelques semaines personnes n'y croirait plus, et ce serait une crise centrale car elle toucherait la BCE, donc l'Euro ; la crise de l'Euro n'a en effet été pour l'heure qu'une crise des budgets publics étatiques. Ce qui est brillant aujourd'hui pourrait ainsi apparaître comme catastrophique demain.

Il faut vraiment autre chose que tout cela, ce qui aidera du reste les Etats à se réformer en motivant les populations européennes...

L'Europe attend d'urgence plus de financements qui doivent être conçus pour relancer l'investissement qui seul donnera des entreprises solides, modernes et compétitive. La question du financement est en effet de nature à améliorer de quelques points la compétitivité globale et celle de la majeure partie des entreprises, et sans cela tous les efforts de compétitivité pourraient être vains. Mais le financement n'est pas seulement un facteur de la compétitivité ou de la productivité, il est une condition structurelle de la création d'entreprises, donc de richesses, puisque sans marché des capitaux (je n'ai pas dit marché financier) convainquant, les investisseurs ne calculent même pas la compétitivité d'un projet industriel, commercial ou agricole dans telle zone ménétaire : ils choisissent un système monétaire et financier plus cohérent.

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